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Pub. Date | Title | Duration | |
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14 Apr 2021 | "Merrick" de Benjamin Diouris | 00:04:37 | |
De (tout petits) moyens n’empêchent pas de faire du grand cinéma, lyrique et ambitieux. Dans un monde décimé par une étrange épidémie, Stanislas Merrick, un ancien champion de boxe, survit reclus et coupé du reste du monde. Son quotidien est bouleversé lorsqu'il fait la rencontre d'Esther, une jeune fille échappée d'un camp de réfugiés et traquée par un ancien soldat. Disponible sur la plupart des plateformes de VOD (Amazon prime, Canal Vod, Orange, Apple Tv+…) Visuel © Affiche "Merrick" Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
27 Feb 2024 | DEBÂCLE : Le poids assourdissant du silence | 00:17:55 | |
En Belgique, Veerle Baetens est une des actrices les plus connues du moment (en France, on se souvient d’elle dans Alabama Monroe). Avec Débâcle, son premier film de réalisatrice, elle s'attaque à quelque chose qui tient de l'invisible : la douleur d'un grave traumatisme d'enfance qui va construire l'identité d'une femme, jusqu'à littéralement l'étouffer une fois adulte. Puisqu'elle ne sait pas l'exprimer oralement, Eva va échafauder un plan radical pour en finir avec le poids de ce passé. Plus qu'une adaptation d'un best seller belge, Debâcle affine le phénomène #MeToo : ici ce n'est pas tant la libération de la parole qui compte que la mèche lente d'un insupportable silence que Veerle Baetens allume avec un film aussi fort que stupéfiant, hardi quand il sait sortir des discours convenus sur la capacité à la résilience comme sur celle du désir de vengeance. En salles le 28 février Retrouvez le Pop Corn d'Alex Masson tous les mercredis à 9h30 sur notre antenne et tout le temps, sur Nova‧fr et toutes les plateformes de podcasts. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
19 Mar 2025 | La cache x Prosper | 00:02:41 | |
Mine de rien, Michel Blanc aura toujours eu une place à part dans le Splendid, ce côté de faire partie de la bande sans totalement y appartenir, d'être un peu en satellite, plus clown triste qu'autre chose. Ça se confirmera ensuite avec sa carrière solo ou ses prestations chez Leconte, Blier ou Téchiné où il tombera un peu plus le masque, pour aller un peu plus vers la mélancolie ou l'inquiétude. L'un des derniers films qu'il aura tournés, avant de mourir connement d'un choc anaphylactique, rappelle étonnamment cette dichotomie. Dans La Cache, Blanc est à la fois au centre d'un groupe, cette fois-ci une famille aussi érudite qu'excentrique plongée dans la tornade de Mai 68 et réceptacle d'une part plus sombre, par le souvenir des années d'occupation allemande et de sa persécution des juifs. Le film de Lionel Baier s'incarne aussi dans cette dualité, capable de fantaisies fantasques (jusqu'à donner une explication hilarante à la disparition de Charles de Gaulle) comme de faire surgir fébrilité ou d'inconsolables blessures d'âmes chez chaque membre de cette famille anar sur les bords. Il faut d'ailleurs saluer, au-delà de Blanc, une véritable troupe d'acteurs impeccables de nuances et demi-teintes, de William Lebghil à Domnique Reymond en passant par Aurélien Gabrielli. La Cache est d'autant plus attachant quand cette présence post-mortem de Blanc conforte le film comme une évocation des fantômes d'un passé à exorciser et d'un présent encore un peu utopique. Une dernière séquence où il transmet le sens de la vie à son petit-fils, offrant à l'acteur un émouvant post-scriptum. La Cache confirme aussi la qualité de passeur de Blanc, qui aura souvent généreusement partagé l'affiche ces dernières années avec une nouvelle génération d'acteurs. Jean-Pascal Zadi n'aura pas eu le temps d'en faire partie. Pour autant, avec Prosper, il semble marcher dans ses pas via le presque double-rôle d'un éternel loser qui se retrouve possédé par l'esprit d'un caïd du milieu des sapeurs congolais. Étonnant film combinant les genres, du fantastique au polar ou la comédie de mœurs, sans être schizophrène, Prosper tient lui aussi, dans un sens, d'une histoire de fantômes quand il sait ressusciter l'esprit des bonnes comédies communautaires des années 80, Black Mic-Mac en tête, pour le rhabiller de couleurs contemporaines fuyant le folklore ou le caricatural pour lui préférer une étude anthropologique touchant à l'universel quand il explore aussi en sous-main les rapports homme-femme. Cette improbable histoire de chaussures magiques se révélant particulièrement bien ancrée dans les pompes de l'époque. La Cache, Prosper. En salles le 19 mars. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Sep 2021 | L'origine du monde : Laurent Lafitte lève des lièvres avec une histoire de chatte | 00:03:31 | |
À quoi tient une bonne comédie ? Peut-être bien à ce que l'on trouve de moins en moins souvent dans celles françaises : un postulat non seulement original mais surtout qui s'en sert pour s'affranchir de certaines limites. Pour son premier film de réalisateur, Laurent Lafitte a fait le bon choix en allant piocher chez l'un des auteurs actuels de théâtre de boulevard les plus audacieux, Sébastien Thiéry. Comme souvent chez lui, l'argument de L'origine du monde, secoue des bases classiques, celle du vaudeville pour les malaxer avec des éléments d'absurde délirant, voire de surréalisme pour un commentaire social bien senti. En l'occurrence, avec un quadra petit bourgeois qui se retrouve un matin avec son cœur qui ne bat plus mais reste pourtant vivant. La seule solution pour retrouver un état normal est de fournir à une psy, marabout new-age sur les bords, une photo du sexe de sa mère. Lafitte a conservé cette combinaison d’Œdipe sur le fond et de Bunuel dans la forme mais ajoute son propre sens du décalage. De quoi se réapproprier la mécanique parfaite de Thiéry pour mieux la détraquer. Là où le dramaturge se demandait si un homme sans cœur est toujours un homme, Lafitte enfonce le clou avec une joviale provocation pour s'attaquer en bonus aux notions de couple, d'amitié ou de famille, le tout sur un ton frontal pas éloigné de ce qu'aurait pu faire un Bertrand Blier avec cette matière. D'ailleurs, Lafitte reprend à son compte le fameux esprit « décontracté du gland» en mettant littéralement à poil le trio déchainé qu'il forme avec Vincent Macaigne et Karin Viard. Ce qui n'empêche pas une paradoxale pudeur, quand derrière les mordants dialogues cash ou les réjouissantes situations trash, L'origine du monde cache une autre mise à nu : entre une incartade au bois de Boulogne, d'insistants dialogues à double-sens entre les personnages joués par Laffite et Macaigne ou des génériques d'ouverture et clôture utilisant des chansons de Marie Laforêt et Shirley Bassey, références culturelles gays, une lecture possible du film comme celui du coming-out de son auteur s'installe rapidement. Il n'est donc pas impossible qu'avec ce solide premier essai derrière la caméra, Laffite coupe bien bien plus qu'un cordon ombilical. Qu'il le fasse à pleine dents, n'en est que honorable. En salle depuis le 15 septembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
04 May 2020 | Bas les masques ! - « Fantômas » d'André Hunebelle | 00:03:45 | |
Pour vivre heureux (lors du déconfinement), vivons masqués. Mais plutôt que de demander au gouvernement comment les porter, posons la question aux grandes figures dissimulées du cinéma. Initialement, cruel maître du crime portant un loup, le génie du mal crée par Souvestre et Allain s’est adouci dans les comédies cultes avec Louis de Funès et Jean Marais. Mais qui était vraiment sous le masque bleu métallisé ? Visuel © Capture d'écran « Fantômas » d'André Hunebelle Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
06 Feb 2024 | GREEN BORDER : les zones grises de l’Europe | 00:02:29 | |
Faut-il franchir certaines frontières pour alerter sur l’horreur des crises migratoires ? Définitivement oui. Il y a quasiment deux ans, la guerre en Ukraine éclatait. Les images de destructions sont restées dans les mémoires, pas celles d'une population fuyant son pays. Le principe d'une instrumentalisation de ces migrants par les pouvoirs politiques encore moins. Green border ne se déroule pas si loin : à la frontière entre le Belarus et la Pologne. Là-bas, une famille de migrants syriens tentant de passer en Suède s'y retrouve ballottée, les gardes-frontière de chaque pays se les renvoyant tour à tour. Agniezska Holland multiplie les points de vue ( via cette famille, un jeune garde-frontière, des activistes) pour raconter l'horreur humanitaire. Green Border se pare de noir & blanc pour s'immerger dans cette zone grise, façonnée par des lois aussi ubuesques que xénophobes. Holland la transforme en terrible examen de conscience, révélateur de la tragédie d'une impuissance citoyenne jusqu'à incarner littéralement le marécage répressif dans lequel l'Europe embourbe les migrants, parfois jusqu'à les en faire mourir. Certains trouveront la méthode discutable. En Pologne, quand Green border est sorti à l'automne dernier, des membres du gouvernement alors en place l'ont d'ailleurs traité de pur cinéma de propagande. Holland en utilise effectivement certains traits dans sa dénonciation particulièrement appuyée. Mais c'est de bonne guerre, fut-elle trouble à jouer sur la corde du tragique et de l'insoutenable. Comment faire autrement pour pousser un retentissant cri d'indignation devant les choix politiques d'une désunion européenne ? Résistant à la fureur des dirigeants du pays, le public polonais a fait un triomphe en salles au film, avant de chasser du pouvoir un parti de droit ultraconservateur, démonstration que tout n'est peut-être pas tout à fait perdu. Au-delà d'une puissance émotionnelle comme de réalisation, ce n'est qu'une raison supplémentaire de pousser à aller voir Green border, ici, dans une France qui s'apprête à vivre sous une loi immigration balafrant profondément sa devise, Liberté, Égalité, Fraternité. En salles le 7 février. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 Aug 2024 | Alien: Romulus x City of darkness : le retour du cinéma monstre. | 00:03:27 | |
Certaines mythologies de cinéma sont increvables. En l'occurence celles d'Alien et du film d'action hong-kongais des années 90, qui font leur retour en salles cette semaine. En 1979, lorsque le premier Alien sort et révolutionne le cinéma de science-fiction, personne n'aurait cru qu'il donnerait lieu à une franchise qui perdurerait quarante-cinq ans plus tard. Qui plus est une des plus passionnantes dans sa gestion, où se sont entrechoquées entre autres les visions de David Fincher, James Cameron ou Jean-Pierre Jeunet avant que Ridley Scott ne se la réapproprie pour aller sur un terrain plus ésotérique avec Prometheus ou Alien : Convenant. Avec Alien : Romulus il a confié les commandes à un réalisateur uruguayen qui a déjà relifté d'autres franchises, d'un pertinent remake d'Evil dead à une solide suite à Millenium. Fede Alvarez revient aux sources, que ce soit en situant ce nouvel opus entre le premier Alien et Aliens mais surtout en renouant avec une part purement organique . En ayant recours à minima aux effets numériques, Alien : Romulus ressuscite l'essence même de la saga, cette incarnation ultra-physique de la peur, a travers une course poursuite entre la créature et une poignées d'humains. C'est du moins la promesse faite par les très efficaces et alléchantes quelques séquences montrées en amont de la sortie, laissant penser que ce nouvel épisode n'est pas un vain raval de façade , mais plutôt un inespéré retour aux racines. Celui de City of darkness l'était tout autant. A partir d'une immersion dans la citadelle de Kowloon, authentique cour des miracles ayant accueilli tous les parias hong-kongais avant sa destruction dans les années 90, Soi Cheang réinvestit le thriller d'action de l'ex-colonie Britannique. A l'époque, Kowloon avait été démoli dans le cadre de la rétrocession à la Chine, dans un esprit de nettoyage. City of darkness lui restitue un sentiment de fourmilière tant par la profusion de personnages que par de dantesques décors arachnéens se resserrant autour d'une guerre des gangs. De quoi édifier un paradis perdu de cinéma kinétique, entre générosité des scènes de combats et participation de légendes d'un âge d'or révolu, de Sammo Hung, compagnon de Bruce Lee et Jackie Chan, imposant en super méchant à Philip Ng, émérite chorégraphe d'art martiaux. Au delà des phénoménales prouesses physiques, City of darkness fait l'éloge de la transmission d'un code de valeurs, ravivant celui d'un cinéma voyou incroyablement revigoré, tout en fureur et chaos soufflant sur les braises incendiaires d'une identité culturelle hong-kongaise qu'on pensait dissoute dans une production chinoise désormais aux ordres du gouvernement. Et si le personnage central de ce film ultra- épique est un clandestin cherchant asile, City of darkness s'impose clairement comme un refuge sanctuarisé pour tout les nostalgiques du cinéma urbain made in Hong-Kong. Bande annonce City of Darkness Alien : Romulus/ City of Darkness. En salles le 14 août. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
18 Jun 2020 | « Themroc » de Claude Faraldo | 00:03:28 | |
Themroc est un ouvrier qui surprend un jour son patron en train de tromper sa femme avec une secrétaire ! Son chef tentant de le faire taire, il s'enfuit et part se barricader chez lui, retenant par la même occasion sa mère et sa sœur en otage. Themroc cède rapidement à la folie et la police va tenter d'intervenir… En DVD (Tamasa éditions), reprise en salles le 1er juillet. Visuel © Affiche « Themroc » de Claude Faraldo Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 Feb 2024 | L’ENFER DES ARMES : Le cinéma hong-kongais des années 80 reste brûlant | 00:02:00 | |
Au début des années 80, le cinéma Hong kongais était l'un des plus stimulants. La colonie britannique hébergeait alors une génération de jeunes réalisateurs qui allait renouveler la production locale pour autant de films urbains déchainés, redonnant la fièvre aux polars. À l'époque, Tsui Hark a déjà deux films au compteur, mais L'enfer des armes va tout changer. Sa matière (un attentat à l'explosif qui avait traumatisé puis effrayé l'opinion publique quand elle avait découvert que ses auteurs étaient des adolescents) est brûlante ; Hark la rend explosive en en faisant le portrait d'une jeunesse nihiliste face à une société ultraconservatrice. En délivrance de la frustration de ses personnages, L'enfer des armes développe une mise en scène éruptive, qui cogne encore plus frénétiquement qu'eux, confortant les principes d'un brûlot anarchiste que la censure d'alors réprimera par des coupes sévères. Quarante ans plus tard, le film, réapparaît dans son montage initial, quand le cinéma hongkongais n'est plus que cendres du volcan créatif qu'il fut, désormais sous la coupe d'une Chine lui imposant d'être sage, de n'allumer que la mèche politique du parti. La virulence de L'enfer des armes, film dont de nombreuses scènes figurent des barreaux ou des barbelés, n'en est que plus suffocante, ressuscitant une véhémente œuvre de jeunesse en puissant manifeste, qui résonne à la fois comme souvenir d'un cinéma aussi épidermique qu'insoumis et enragé coup de gueule. Amplifié par le joug d'un pouvoir plus que jamais répressif, ce requiem de la jeunesse entravée d'alors, sidère par ses airs d'Histoire du chaos et de la violence d'aujourd'hui, toujours plus embrasée par la colère. En salles depuis le 7 février, prochainement en Blu-ray chez Spectrum films. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
30 Jul 2021 | "The Sparks Brothers" d’Edgar Wright | 00:03:39 | |
Les Sparks sont le moins connu des groupes les plus influents. Un docu aussi pop et énergique que leur musique revient sur cette énigme. The Sparks Brothers est une odyssée musicale qui raconte cinq décennies à la fois étranges et merveilleuses avec les frères/membres du groupe Ron et Russell Mael, qui célèbrent l’héritage inspirant des Sparks : le groupe préféré de votre groupe préféré. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
29 Jun 2021 | "De l'or pour les chiens" d’Anna Cazeneuve Cambet | 00:12:23 | |
À quoi ressemblent les jeunes femmes en fleur d’aujourd’hui ? À un film (et une révélation fulgurante d’actrices) qui ne craignent ni les épines ni les demandes d’amour. Fin de l’été, Esther 17 ans, termine sa saison dans les Landes. Transie d’amour pour un garçon déjà reparti, elle décide de prendre la route pour le retrouver à Paris. Des plages du sud aux murs d’une cellule religieuse, le cheminement intérieur d’une jeune fille d’aujourd’hui. Visuel © Rezo Films Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
05 Jan 2022 | "Neige" de Juliet Berto : le retour d’une comète des années 80 | 00:03:42 | |
Au début des années 80, on ne faisait pas des boules avec la neige, mais on se la fourrait dans le nez. Dans le Nord de Paris, de Pigalle à Barbès, c'est comme ça qu'on appelait la cocaïne. Elle et d'autres drogues faisaient partie des murs du coin, étaient presque des résidentes de ces quartiers qui n'avaient encore aucune idée de ce qu'était la gentrification. A l'époque, ils sont encore une sorte de cour des miracles du XXe siècle ; à la fois à la marge et communauté prolo solidaire. Le cinéma français d'alors s'y est souvent intéressé, notamment du côté du polar, de La Balance à Diva, souvent pour s'y encanailler. Moins pour réellement filmer cette faune dans son décor naturel. Juliet Berto, actrice chez Rivette ou Godard en a fait sa propre nouvelle vague de réalisatrice avec Neige, premier long-métrage, co-réalisé avec son compagnon, Jean-Henri Roger, se souvenant du réalisme poétique des dialogues Prévert et Carné tout en observant des corps contemporains. Du cinéma qui bat le pavé, renoue avec une galerie de personnages gouailleurs, qu'ils soient barmaid, travelo, curé ou dealer. Du vrai cinéma de quartier donc ? D'autant plus quand Neige est un film très resserré autour de sa chronique de village urbain, qui réinjectait dans ses veines l'envie, justement, de la Nouvelle Vague de faire entrer la vie dans le cinéma. Berto et Roger avaient même l'habitude de dire que ce film s'était fait sous leurs fenêtres, celle d'une rue du 18e arrondissement côté Goutte d'or, cadre qui a donc fait office de naturalisme. La fiction autour du quotidien et de ses petits trafics s'y adapte, d'une poursuite dans un magasin Tati à un flinguage sous les néons d'une fête foraine. Neige est un film qui prône donc le mélange, entre patronnage d'acteurs d'avant comme Eddie Constantine ou Raymond Bussières et nouvelles trognes d'alors, celles de Jean-François Balmer, Jean-François Stévenin ou même Bernard Lavilliers dans une apparition furtive, voire Berto valsant entre devant et derrière la caméra. Quarante ans après sa sortie initiale, Neige a forcément un goût de cinéma disparu, un peu unique – Deux ans plus tard, Cap Canaille, le second et avant-dernier film de Berto, se délocalisait à Marseille, mais avait déjà perdu de ce regard à la fois franc, sans aucun second degré, essayant de capter ce qui subsistait encore de lumière et de chaleur dans ces années 80 qui ne tenaient déjà plus leurs promesses sociales. Vu d'aujourd'hui, Neige sidère au minimum par son refus du misérabilisme (oui, il est donc question de came, mais on n'en verra jamais un gramme à l'écran) mais surtout par cette capacité à être accro à l'urgence de vivre ; du vrai cinéma immersif qui continue à baigner dans un jus qui manque à la production française actuelle. Tout comme Berto et Roger, morts et enterrés depuis longtemps. Neige est aujourd'hui déterré d'années d'invisibilité en salle, mais toujours aussi immaculé. Reprise en salles, le 5 janvier Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
12 Jun 2024 | C’EST PAS MOI x JIM HENSON, L’HOMME AUX MILLE IDÉES : LIBERTÉ DE PENSER | 00:02:38 | |
Il suffit parfois de prononcer le nom d'un cinéaste pour entrer dans un monde à part. Prenons le cas de Léos Carax. Rien que ce patronyme qu'il s'est choisi, anagramme de sa véritable identité, est une manière de ne pas vouloir entrer dans des cases, d'affirmer une personnalité. Ses films, tous hors normes, l'ont encore plus appuyé. Alors, il faut forcément prendre le dernier comme une ironie dès son titre. C'est pas moi. Drôle d'incipit pour un autoportrait, qui n'aurait d'ailleurs même pas dû être un film, mais l'accompagnement d'une exposition commandée par le Centre Pompidou qui n'aura finalement pas lieu. Carax en a fait une visite de son musée intime ; 40 minutes pour faire un bilan à ce jour de l'homme comme du cinéaste. Un collage d'images, assemblant scènes nouvelles tournées pour l'occasion et extraits ou images d'archives, questionnant autant le passé que le futur pour des raisonnements à la maraboud'ficelle, parfois déconcertants, souvent fulgurants. Le lien avec le Godard de la grande période se fait d'autant plus que C'est pas moi reprend la forme de ses Histoire(s) de cinéma, pour une sorte d'épisode inédit piraté par Carax. Il arrive à cette lettre ouverte à tous les vents de s'éparpiller, mais jamais de s'écarter du ludisme, pour un film qui ressemble bien à son auteur, entre créativité inventive et mélancolie chevillée au corps. On regrettera juste que son meilleur trait d'esprit n'ait pas été suivi : puisque c'est un film qui travaille du chapeau, il a été un temps question que ses spectateurs fixent eux-mêmes le tarif du billet en donnant ce qu'ils veulent. Pour le coup, c''est pas lui qui a empêché cette idée d'aller à son terme. Avec Jim Henson, le public en a toujours eu pour plus que son argent : le créateur des Muppets à l'a comblé pendant des décennies au point d'avoir été occulté par les géniales créations que furent Kermit et ses acolytes. L'homme aux mille idées retrace sa carrière, avant, pendant et après les Muppets, pour révéler son foisonnement créatif, équivalent à celui d'un Walt Disney. Raconté par ses collaborateurs et ses enfants, Henson s'y incarne dans son génie comme dans ses failles, à la fois au service de valeurs familiales quand il supervisait Sesame Street mais absent à sa propre famille, pratiquant de techniques artisanales pour ses marionnettes mais féru des technologies les plus avancées pour les mettre en scène. L'homme aux mille idées – et autant de paradoxes- est un hommage d'autant plus vibrant qu'il ne fuit pas la complexité d'Henson, ayant cherché à accomplir ses ambitions un peu folles d'adulte via une vie d'artiste dédiée avec sérieux aux enfants. Les témoignages emplis d'admiration qui s'égrènent au long de ce beau documentaire confirment que c'est aussi pour cela que l'oeuvre d'Henson continue à nous toucher, même quand on est devenus grands. "C'est pas moi" en salles le 12 juin/ Jim Henson : L'homme aux mille idées. Sur Disney + Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 May 2020 | « La Rupture » de Philippe Barassat | 00:03:32 | |
Le cinéma de Philippe Barassat continue à rompre avec les habitudes, en proposant une véritable variation sur un même « t’aime ». Marie-Louise vient déclarer à Jean, l’écrivain avec qui elle a eu une longue liaison qu’elle le quitte. Mais avec l’amour, les choses ne sont jamais si simples que ça. Lors de leur explication, l’auteur lui dit rapidement que tout ceci « n’a pas de sens ». Philippe Barassat en donne deux à La rupture en le dédoublant en deux versions (celle-ci, et une seconde, reprenant précisément les mêmes déroulés et dialogues, mais en faisant de Jean, une romancière). Un très beau geste gracieux de cinéma, doublé lui aussi : ces deux films sont disponibles en accès libre sur YouTube. Ça se passe ici et ici. Visuel © Capture d'écran Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 Nov 2024 | Le Royaume X Gladiator II | 00:02:48 | |
Et si le cinéma français allait vers une certaine idée d'appellation contrôlée ? Depuis quelque temps maintenant, il est devenu acquis que le terme de territoire a quasiment remplacé celui de régions. Ça fait plus noble, mais surtout, ça commence à donner des idées à des cinéastes qui intègrent pleinement à leur récit, des endroits, une terre. Ainsi, le principe d'un cinéma made in Corscia creuse son sillon. Récemment, c'était À son image qui entremêlait parcours d'une photographe et histoire de l'île de beauté, aujourd'hui voici Le royaume, immersion dans un clan vu par le prisme de la fille d'un de ses parrains, qui va devoir accompagner son père dans une fuite en avant. Julien Colonna propose tout autant à son film de prendre le maquis en racontant la Corse et ses complexités sans jamais s'aventurer sur le terrain du politique. Le royaume se concentrant sur des liens du sang qui vont épaissir une vendetta. Et à travers ce duo père-fille qui s'apprivoise tout en voyant les cadavres s'amonceler autour d'eux, faire le constat d'un cycle de la violence qui se perpétue, devient un héritage tragique de générations en générations. Si Le royaume, film de gangsters antispectaculaire mais d'une rare puissance pour s'infiltrer dans l'intimité tient d'un requiem, il est aussi celui d'une naissance : celle de Ghjuvanna Benedetti, renversante apparition d'une actrice de caractère. Bien loin de la Corse, il y a un autre royaume, celui du cinéma hollywoodien. Où quelque chose est en train de pourrir. J'aurais adoré évoquer la sortie de Gladiator II, la sortie maousse de cette semaine, ce ne sera pas le cas, faute d'avoir eu accès à ses projections presse, verrouillées à l'extrême par son distributeur. Une tendance qui s'amplifie, les grands studios américains décrétant de plus en plus, comme un empereur romain selon son bon plaisir, quel média est digne ou non de voir leurs films, estimant qu'une campagne d'affichage maousse et des tapis rouges d'avant-premières commentés par des influenceurs sont plus profitables qu'une chronique. Paul Mescal est-il donc un successeur notable de Russell Crowe dans le nouveau néo-péplum signé Ridley Scott ? Cette suite était-elle nécessaire ? Aucune idée. À l'inverse, il est certain que les relations entre ces studios et la presse cinéma tiennent désormais de tristes jeux du cirque, ouvrant une arène où les combats vont être rudes. Le royaume / Gladiator II. En salles le 13 novembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
27 Mar 2024 | LE JEU DE LA REINE x O CORNO : histoire(s) de femmes | 00:02:47 | |
Sous Henry VIII ou sous Franco, la condition féminine était déjà sine qua non. Allez savoir ce qui se serait passé si #MeToo avait eu lieu dans l'Angleterre du XVIe siècle. Peut-être qu'Henri VII n'aurait pas collectionné les épouses, ni envoyé deux d'entre elles à l'échafaud. Karim Aïnouz revient sur cette page d'histoire pour la réécrire selon le point de vue de sa sixième épouse Catherine Parr. Le jeu de la reine la voit en femme progressiste qui se heurte autant à son époux qu'à une cour prête à comploter contre elle pour hérésie. Le thriller paranoïaque en costume ne cache pas son ambition d'une lecture ultra-déconstruite. Pourquoi pas, si ce principe ne se faisait pas au nez de cette évocation du Barbe-bleue anglais, résumé à un psychopathe, pourrissant littéralement de l'intérieur, une gangrène lui attaquant les jambes. Le trait très épais du propos coupe l'herbe sous le pied d'une tentative – pourtant séduisante sur le papier – de chronique de palais patriarcal reliftée féministe. L'écrin nacré par une splendide photo qui ressuscite les clairs-obscurs des grands peintres flamands n'enrobe dès lors qu'un duel, lui royal au bar, entre Alicia Vikander, en pré-suffragette et Jude Law, qui s'en donne à cœur joie en monarque dégénéré. O corno accouche bien mieux de son discours. Littéralement dans une séquence d'ouverture où une femme donne douloureusement naissance à un bébé. Dix minutes intenses annonçant le programme du film de Jaione Camborda, exploration de la condition féminine dans l'Espagne des dernières années du franquisme. Le parcours d'une avorteuse de village devant fuir après la mort accidentelle d'une fille qui ne voulait pas être mère est celui d'une femme qui apprend à se redresser après avoir du tant courber le dos. Aux douleurs de la chair, Camborda superpose la sensorialité d'une terre malgré tout nourricière et la part consolante d'une sororité, fut-elle clandestine. Pour sa sortie française, O corno voit son titre original complété de la mention « une histoire de femmes ». Camborda en fait aussi celle de leurs corps, via l'épopée aussi physique que spirituelle d'une héroïne, prise entre les coups de cintre de la loi et celui qu'elle a utilisé pour s'avorter. Cette scène-là est ici sous-entendue ; pas le prix qu'avaient à payer les femmes pour disposer de leurs corps dans l'Espagne des années 70. O corno, se faisant utile piqûre de rappel universel dans une période où les droits à l'IVG sont menacés dans nombre de pays. Le jeu de la reine & O corno. En salles le 27 mars Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Apr 2025 | Bergers, aussi sensoriel qu'existentiel | 00:20:49 | |
Au début des années 2000, Mathyas Lefebure, un publicitaire canadien décide de tout larguer pour s'exiler en provence pour devenir berger. Il en tirera un livre, D'où viens-tu berger ? qui fera sensation au Québec jusqu'à interpeller Sophie Deraspe, une réalisatrice aux films mettant en friction expérience du réel et forces narratives du cinéma. Avec Bergers, cette fois-ci au pluriel, elle retrace l'expérience de Lefebure pour la rendre plus collective, interroge la nécessité mais surtout les difficultés de renouer, dans une époque ou la société de consommation est reine, avec des valeurs terriennes, humaines, pour un film aussi sensoriel qu'existentiel. Entretien avec la réalisatrice Sophie Deraspe, qui raconte à Nova la vraie nature et le chemin pour passer du réel à la fiction. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
21 May 2024 | CANNES JOUR 5 : Fromage et dessert | 00:02:23 | |
Il faut parfois savoir être discret pour se faire remarquer à Cannes. En coulisses du vacarme omniprésent de la compétition, certains films à profil plus bas finissent toujours par trouver la lumière. Cette année, c'est au sein de la section Un certain regard que deux d'entre eux ont ravi par leur humilité. Vingt Dieux ! et My Sunshine partagent aussi une identité de terroir. Le premier se pose dans le Jura, pour suivre la débrouille de Totone, 18 ans, qui se retrouve du jour au lendemain à devoir gérer tout seul la ferme familiale. Pour sortir de la mouise, il se lance dans la fabrication de Comté, espérant décrocher un substantiel prix du meilleur fromage. Louise Courvoisier ne fait pas cailler le lait de ce pitch improbable, l'ingrédient principal de son film restant l'initiation d'un grand gamin à la solidarité comme à l'amour. L'environnement, monde rural dans la dèche, est rugueux, le casting de comédiens non-professionnels aura été sauvage, mais Vingt Dieux ! charme par sa tendresse. Courvoisier gagne illico ses galons d'appellation contrôlée en se situant idéalement entre les cinémas de Ken Loach et de Maurice Pialat, naturaliste, mais sans sentimentalisme, âpre, mais qui soutient ses personnages pour qu'ils restent debout. Pendant que Vingt Dieux ! s'échauffe au soleil d'un été, My Sunshine fait tomber la neige sur deux ados japonais, Takuya et Sakura, pris sous l'aile d'un coach de patinage artistique. Hiroshi Okuyama fait de jolies arabesques autour de ce trio pour explorer les grands chagrins de l'enfance comme les regrets de l'âge adulte. Les rares éclats de My Sunshine résonnent d'autant plus dans une atmosphère aussi cotonneuse que minimaliste, tout comme les fissures, qui vont s'attaquer au lien entre ces deux sportifs en herbe et leur mentor, sont invisibles à l'œil nu. Okuyamadéveloppe avec la même grâce le discours sur les stéréotypes de genre qui prend peu à peu sa place dans ce dispositif épuré. S'ouvrant sur un début d'hiver, My Sunshine se clôt sur les premiers bourgeons d'un printemps. Ce film délicat se révèle alors comme une ultime bulle protectrice pour Takuya et Sakura, glissant désormais vers les réalités, parfois cruelles, de la vie. Pendant le Festival de Cannes, retrouvez tous les jours la chronique Pop Corn d’Alex Masson, notre envoyé à la croisette, à 7h37 dans « T’as vu l’heure ? », la matinale de Radio Nova. Photo : Vingt Dieux !, 2024 Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
08 Sep 2021 | Afrofuturistik : la science-friction africaine | 00:03:53 | |
Où en est-on, en France, avec le cinéma africain ? En fait, un peu nulle part. Alors que la plupart des sélectionneurs de festivals s'accordent à dire qu'il y a quelque chose qui frémit sur ce territoire, qu'une nouvelle génération est en train de se mettre en place ; vu d'ici, la découverte de ce cinéma-là est majoritairement rétrospective, patrimoniale. Depuis 2013, Quartier Lointain s'efforce d'y remédier en proposant régulièrement des programmes de courts métrages récents issus de tout le continent africain, regroupés autour d'un thème. La 6e édition agrège cinq films autour de l'idée d'Afrofuturisme. Une bonne idée quand elle s'intéresse à ce qui s'est passé autour du phénomène qu'à été Black Panther, le triomphant blockbuster Marvel et sa reconnaissance d'une culture africaine. Qu'importe si elle est passée par une réappropriation hollywoodienne, Afrofuturistik propose justement un effet miroir, avec des films, kényan, rwandais, nigérian, marocains ou congolais, très différents sur la forme ou le ton mais se rejoignant dans le principe d'une vision de l'Afrique actuelle par une Afrique reprenant à son compte les codes de la mondialisation. Y compris ceux d'un cinéma de genre, en l'occurrence la science-fiction. Refiltrée par les imaginaires de cinq réalisateurs pour une sorte de colonisation retournée à l'envoyeur, elle vire à la science-friction en confrontant mondes d'hier, aujourd'hui et demain. Qu'il soit question d'un Maroc quasi post-apocalyptique dans Qu'importe si les bêtes meurent, des rivalités de sorcières nigérianes dans Hello Rain ou du premier spationaute rwandais resté trop longtemps en orbite dans Ethereality, la question de pouvoir associer traditions narratives ou culturelles et projection dans le futur est commune à ces courts métrages. Jusqu'à former une passionnante agora proposant des réponses méditatives ou cinglantes quand We Need Prayers : this one went to market, analyse de manière fulgurante en quelques minutes du marché de dupe que sont les rapports entre l'Afrique et le monde occidental, tandis que Zombies se fait particulièrement lucide pour danser sur la transe de la communication à tout crin et des réseaux sociaux. Le tout avec autant une énergie et une pertinence dans le propos social ou politique, dont ferait bien de s'inspirer le cinéma européen ou américain. En salles depuis le 1er septembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
10 Sep 2024 | Noémie Merlant au micro de Nova : sa passion pour le cinéma étrange | 00:10:43 | |
L’Étrange Festival a 30 ans, un rendez-vous toujours réussi des bobines "bizarres". Du 3 au 15 septembre, au forum des images à Paris, le festival met à l'honneur les films déviants, hors normes, louches, les thrillers, et films d'horreurs. On y retrouve ceux que l'on connaît déjà, comme Enter the void de Gaspar Noé, mais aussi des inédits, comme une version “director’s cut” du film Tusk d'Alejandro Jodorowsky. Sont également à l'affiche La colline a des yeux de Wes Craven, ou le mythique Freaks de Tod Browning. Ces deux derniers ont été sélectionnés par Noémie Merlant, qui a carte blanche pour le festival. L’actrice, vue aux cotés d’Adèle Haenel dans Portrait de la jeune fille en feu, ou plus récemment dans l’Innocent de Louis Garrel. Au micro de Nova, elle raconte sa passion pour l’étrange, une bizarrerie qui sera à l’oeuvre dans ses deux prochains films : Emmanuelle, en salles le 25 septembre et Les Femmes au balcon, qui verra le jour en décembre. Noémie Merlant est souvent associée au female gaze, et pourtant, elle a choisi trois films réalisés par des hommes, elle nous explique son choix au micro d'Alex Masson. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
20 Mar 2024 | HORS SAISON/ SMOKE SAUNA SISTERHOOD : en thalasso ou au sauna, on se décrasse | 00:02:34 | |
Cette semaine au cinéma, 2 salles, 2 ambiances : en tête d'affiche, Hors Saison, le nouveau film de Stéphane Brizé qui fait un ménage de printemps : terminé le cycle sur le monde du travail avec Vincent Lindon en chevalier pourfendant les injustices sociales. C'est toujours la crise, mais cette fois-ci de manière plus introspective autour d'un vrai-faux autoportrait de Guillaume Canet dans le rôle d'un acteur parti en thalasso bretonne pour faire le point sur sa vie. C'est celle d'avant, via les retrouvailles avec son grand amour abandonné qui va remonter à la surface. On pourrait presque rebaptiser ça Un homme et une flamme. En tous les cas, ça rappelle énormément le Claude Lelouch des grandes heures, y compris dans ses chabadabadas et digressions inattendues. On peut trouver cet esprit de comédie romantique sentimentale suranné, mais le couple Canet/Alba Rohrwacher, tout en atermoiements, fait plus que le job. Brizé a fait appel à Vincent Delerm pour la musique de son film. C'est un choix cohérent : Hors Saison y ressemble dans son humeur lymphatique, mais à la mélancolie attachante. Pendant que Guillaume Canet est donc en thalasso à Quiberon, en Estonie, la communauté Voro entretien la tradition du sauna pour les femmes. Celles de Smoke Sauna Sisterhood en font un espace protégé, lieu où elles peuvent tout se dire, tout exprimer. La parole est encore plus à nu que les corps dans ce surprenant documentaire qui dissipe tout écran de fumée. Ici, des femmes de tous âges, de tous physiques se livrent comme dans un confessionnal bienveillant, où elles peuvent autant se marrer joyeusement en parlant de dick pics que se délivrer du traumatisme d'un viol ou du diagnostic d'un cancer. Anna Hints enveloppe ce choeur féminin souvent brut de décoffrage dans une douceur sensorielle et une abstraction sensuelle, achevant de faire de Smoke Sauna sisterhood une bulle de chaleur humaine qui agit comme un gommage, nettoyant ces femmes de la culpabilité du silence. Ce sauna a été reconnu par l'UNESCO comme un inaliénable lieu d'héritage culturel. Un label que mériterait ce documentaire décrassant autant les yeux que les esprits. Hors Saison et Smoke Sauna Sisterhood, en salles le 20 mars Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
03 Apr 2024 | DRIVE-AWAY DOLLS x LE SQUELETTE DE MADAME MORALES : crises de couple | 00:02:40 | |
Pendant qu’un frère Coen fait son coming-out queer, une perle mexicaine des années 60 fait un mariage de déraison. Les frères Coen ont tellement portraituré l'Amérique profonde au gré de leurs films, qu'on aurait pu y voir une forme de fétichisme. Maintenant qu'ils sont séparés et font des films chacun de leur côté, l'affaire paraît plus compliquée. En apparence, Drive-away dolls joue leurs cartes usuelles : intrigue de polar déglingué, galeries de personnages excentriques et course-poursuite virant roadtrip entre la Pennsylvanie et la Floride. Le premier film d'Ethan Coen en solo va pourtant sur un terrain que la fratrie avait jusque-là toujours laissé à l'écart : le sexe. Et autant dire que Drive-away dolls se met au goût du jour avec un couple de lesbiennes émoustillées, quasi sorti d'une version hardcore et prolo de Sex & the city. L'intrigue policière autour du mystérieux contenu d'une valise n'est qu'un prétexte pour virer une cutie vers l'univers queer. Si Jamie et Marian se retrouvent rapidement avec des hommes de main au cul, Drive-Away dolls marque surtout à la culotte les codes des séries B masculinistes, pour les rallier à ceux d'une rom-com délurée, appelant une chatte une chatte. Pour autant, à l'exception de Margaret Qualley et Géraldine Wiswanthan, parfaites en remix goudou d'un duo de buddy movie, cette cavalcade se fait peine-à-jouir par sa réalisation de cartoon en carton ou ses interludes psychédéliques bariolés métamorphosant la modernité du fond en coup de provoc périmé. On pourra trouver Le Squelette de Madame Morales plus incisif, plus transgressif. Cette autre histoire de cornecul, autour d'un médecin mexicain taxidermiste à ses heures et de sa femme aussi bigote qu'infirme, a pourtant été tournée en 1960. Luis Alcoriza, un scénariste récurrent de Luis Bunuel y malaxe une nouvelle de folk-horror mexicaine l'amenant vers une féroce chronique de faits divers. L'arme la plus tranchante de cette tentative de meurtre parfait est un humour noir, tailladant autant la religion catholique que le machisme ou le confort conjugal. Faisant traverser le Rio grande au mauvais esprit des comédies cinglantes italiennes ou anglaises de l'époque, Le squelette de Madame Morales frictionne un jouisseur égoïste et une grenouille de bénitier odieuse pour dédiaboliser gaillardement une hantise de la sexualité, égratigner joyeusement les hypocrisies sociales de la petite bourgeoisie mexicaine dans une satire vivifiante qui plus de soixante ans plus tard n'a décidément rien d'empaillé. Drive-Away dolls & Le squelette de Madame Morales. En salles le 3 avril Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
11 Jun 2020 | « Il était une fois dans l'Est » de Larissa Sadilova | 00:03:16 | |
Quand le cinéma russe prend la route c’est pour confirmer que tous les chemins, mêmes bucoliques, mènent au Kremlin. Les jours s'égrainent harmonieusement dans un paisible village de Russie. Anne prend chaque semaine le bus pour aller vendre ses tricots à Moscou. Mais elle en descend après quelques virages. Le même jour, son voisin routier va charger son camion pour une longue semaine de voyage. Il s'arrête lui aussi immuablement à la sortie du village... Désir, amour, suspicion et badinage, rien ne peut rester longtemps secret… En VOD (Canal VOD, Film TV, Google Play, iTunes, Orange, UniversCiné, Wuaki) Visuel © Affiche « Il était une fois dans l'Est » de Larissa Sadilova Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
05 May 2021 | "Shadow In The Cloud" de Roseanne Liang | 00:03:28 | |
Le virilisme en prend pour son grade dans série B féministe qui prend son envol en envoyant une héroïne badass en l’air... Pendant la Seconde Guerre mondiale, une jeune mécanicienne voyageant avec des documents top secret à bord d’un bombardier B-17 est confrontée à une présence maléfique qui risque de compromettre sa périlleuse mission. Visuel © Affiche "Shadow in the cloud" Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
02 Oct 2024 | Joker : Folie à deux x Wolfs | 00:02:51 | |
Joaquin Phoenix est une énigme. A la fois comédien impeccable impliqué dans des films généralement audacieux et boule de nerfs à vif, connu pour ses revirements et un caractère des plus introvertis. Ça en faisait peut-être l'acteur idéal pour jouer le Joker. Il y a cinq ans, il triomphait dans un film consacré à la genèse de l'ennemi juré de Batman. Revisite du personnage de BD, ce premier opus, plus proche de Taxi Driver que d'un film de super-héros scrutait les névroses américaines, à travers la psychose d'un anti-héros poussé à bout, basculant dans la démence criminelle. Joker : folie à deux l'enferme dans un hopital psychiatrique et une salle de tribunal, décors quasi uniques de ce second volet. C'est étonamment, à la barre de danse que vont défiler les personnages, Joker : folie à deux délaissant la part de brûlot attendue pour se faire comédie musicale décalée autour d'un duo Phoenix/Lady Gaga, en psychopathes roucoulant une romance. L'idée est gonflée, mais la petite musique de Joker : folie à deux est désacordée jusqu'au dissonant. Il y est question de masques et de schizophrénie, mais en lieu et place de la tribune anarchiste haute en couleurs du premier film, celui-ci se fait toujours plus opaque, notamment autour du rôle tenu par Gaga, qui tient de l'attrape-gogos. 2h19 d'ennui chanté plus tard, plus que le rire cabossé du Joker, c'est l'impression d'une pénible et bien trop longue blague qui persiste. Autre duo , autre pas de danse avec Wolfs, lui aussi porté par un casting très séduisant sur le papier : Brad Pitt et George Clooney. Potes à la ville les voilà antagonistes à l'écran : ils sont ici deux nettoyeurs de scènes de crimes concurrents mais se retrouvant sur un seul et même job. Parti comme une comédie policière, Wolfs fait rapidement le ménage pour s'assumer comme un buddy movie rétro. Qu'importe les écarts de route d'un scénario foutraque, passant par une course poursuite après un gars en slip dans Chinatown ou une virée chez les mafias croates et albanaises, la seule chose qui compte ici est ce duo de loups solitaires qui s'apprivoisent et se reconnaissent. Clooney et Pitt rivalisant d'attitudes cools et dialogues croustillants pour ressusciter un cinéma d'acteurs américain à l'ancienne. Et s'il y a de quoi hurler au loup devant l'écriture particulièrement nonchalente voire feignante de Wolfs, la jubilation de voir ces deux là retrouver la formule entre charisme et décontraction, qui fait les tandems les plus iconiques, jusqu'à un beau final façon Butch Cassidy et le Kid, n'est vraiment pas négligeable. Joker : folie à deux. En salles le 2 octobre. Wolfs sur Apple TV+ Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
21 Aug 2024 | Emilia Pérez x Zénithal : il n’y a pas que la taille qui compte | 00:02:36 | |
Parcours d’une transgenre chez les narcos ou comédie conjugale loufoque, les sorties de la semaine ne sont qu’amour. Passé un certain âge, certains cinéastes s'installent dans une routine. Un axiome réfuté par Jacques Audiard, cinéaste septuagénaire qui n'a cessé de prendre des chemins de traverse. Du moins formellement. Pour ce qui est des sujets, il reste arrimé à une vision profondément romantique et sentimentale des rapports amoureux. L'enveloppe, elle change à chaque film. Au point de devenir un pitch en soi pour Emilia Perez, film sur la transition d'un narco-trafiquant en femme, épousant son principe jusqu'à lui même faire différentes mues, passant de la comédie musicale au mélo façon télénovela. Vous avez dit film transgenre ? Oui, dans son épiderme. Sa chair elle reste la matrice même du cinéma d'Audiard, cette envie de déconstruction des valeurs morales des personnages ou au minimum des valeurs virilistes. Cette fois-ci pour une vision baroque – et parfois roccoco – des choses, assez estomaquante en terme de spectacle ou dans un questionnement identitaire, superposant ceux de son personnage-titre et d'un cinéaste chercheur de formes. Ça a ses limites quand Emilia Perez laisse rapidement de côté certaines questions, du maelström qu'est un Mexique écartelé entre l'ordre et la violence à certaines fractures sociales, mais n'en reste pas moins surprenant et inédit dans sa proposition de cinéma transformiste. Des limites, Zénithal n'en connait pas beaucoup. Il est aussi question d'une altérité homme-femme dans cette comédie secouée mêlant machiavélique complot masculiniste pour asservir la gent féminine, combats de kung-fu et greffe de cerveau dans... des pénis géants ! Foutraque ? Oui, assurément mais surtout totalement assumé par l'alliance entre premier degré de la croisade d'un loser pour reconquérir son couple et un concept de base loufoque. Le potentiel de nanardisation asphyxie souvent la réflexion sur la conjugalité moderne, mais l'entrain d'un casting à fond les ballons pour accompagner ce franc délire a quelque chose de réjouissant. Au minimum par une désinhibition totale pour s'essayer à une réécriture, malgré tout sensible, de la rom-com ou en tordant le cou à la pensée Incel en assurant définitivement qu'elle est con comme une bite. Emilia Perez / Zénithal. En salles le 21 août. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
02 Dec 2020 | Le livre « Censure & Cinéma en France » | 00:03:51 | |
À l’heure où l’on s’interroge sur l’utilisation des images de violences policière, un copieux ouvrage collectif rappelle que même au cinéma, la censure, c’est une affaire de pouvoir. Que peut-on montrer dans un film en France ? Depuis 1916, une commission est chargée de contrôler les images de cinéma. De son historique à ses évolutions, en passant par d’étonnants cas d’école, Censure & Cinema en France (Editions LettMotif) revient sur cet organisme plus complexe qu’on le croit, et à ses résonances sociales. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Jan 2025 | Le Dossier Maldoror X Babygirl | 00:03:42 | |
Demandez à n'importe quel Belge quel reste l'évènement récent qui a le plus marqué le pays, il y aura de fortes chances pour qu'il réponde l'affaire Dutroux. Du nom de celui qui enleva et séquestra une dizaine d'enfants dans les années 90, en assassinant certains. Un cas resté un traumatisme national, notamment dans les errements de son enquête, ayant révélé un système policier et judiciaire défaillant, puis mené à sa profonde réforme. Quasiment trente ans plus tard, Fabrice Du Welz rouvre cette plaie, autour de l'enquête d'un jeune gendarme sur la disparition de deux gamines, qui va virer à l'obsession. Au-delà de cette traque, Le Dossier Maldoror est un récit étonnamment intime de la dévoration d'un idéaliste, à l'âme rongée par sa quête. De Calvaire à Inexorable, Du Welz a souvent filmé des personnages borderlines, mais prend ici de l'ampleur pour ausculter ce qui est devenue une névrose collective. Le Dossier Maldoror sera donc une saga qui se déploie autour d'une société, racontant, bien plus que l'affaire Dutroux, une identité belge, de la solidarité de plusieurs générations d'immigrés à la honte de n'avoir pas pu voir ce qui se tramait dans les maisons d'à côté, ou aux vestiges d'une ville comme Charleroi, un temps parmi les plus riches du pays, désormais dévastée par la précarité. Le Dossier Maldoror déborde alors brillamment du cadre prévu, quittant les rives des grands films somatiques d'enquête (comme Zodiac, repère ici clairement assumé), pour aller ailleurs. Par exemple le temps d'une extraordinaire scène de mariage, ou d'autres scènes immersives qui se rapprochent du travail de sédimentation d'un Michael Cimino, en prenant le temps de raconter comment un tel fait divers contamine une population entière. Voire, par la galerie de protagonistes directement liés à Dutroux, devenir une perturbante étude du Mal ordinaire et de sa complexité. Elle est confirmée par le titre du film - dans la réalité, l'opération policière avait pour nom Othello - citation des Chants de Maldoror, texte du poète surréaliste Lautréamont où l'on pouvait lire le résumé le plus évident du fond de ce film cherchant ce qu'il peut rester de lumière dans la plus grande des noirceurs : "il est beau de contempler les ruines des cités ; mais, il est plus beau de contempler les ruines des humains !" Dans Babygirl, c'est Nicole Kidman qui se retrouve en ruines. Ou du moins son personnage de PDGère d'une boite de new tech de plus en plus troublée par un stagiaire qui l'initie à des jeux sexuels autour de rapports de domination. Annoncé comme une intrigante version cérébrale de thriller érotique, Babygirl est plus émoustillant dans ce qu'il cache derrière sa culotte : une vision au scalpel d'un monde contemporain où le capitalisme et ses enjeux de pouvoir seraient devenus une forme de frigidité ayant pris le dessus sur les corps. Cette veine politique palpite malheureusement moins qu'une intrigue planplan de trahison conjugale, quand ce n'est pas le frein à main qui est mis sur tout ce qui touche aux pulsions SM pour s'aseptiser autour d'un propos basique sur les valeurs du consentement. Plus intéressante, la performance de Kidman, en patronne et épouse découvrant que se laisser submerger par ses désirs est plus épanouissant que d'être en permanence dans le contrôle. Une piste intrigante qui s'évanouit toutefois quand Babygirl tend toujours plus vers un remake inversé (cette fois-ci c'est l'épouse qui s'aventure dans la transgression), y compris donc dans le casting de Kidman, d'Eyes Wide Shut, pour arriver à la même conclusion ultra-conservatrice d'un retour au foyer et d'une mise sous le tapis de tout ce qui pourrait déranger la norme conjugale. Le Dossier Maldoror / Babygirl. En salles le 15 janvier Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
01 Apr 2020 | « La Vie de château » de Clémence Madeleine-Perdrillat et Nathaniel H’limi | 00:01:59 | |
Un court-métrage aussi aérien qu’enchanteur pour dissiper les nuages qui pourraient plomber les mômes confinés. Orpheline, Violette, 8 ans, part vivre avec son oncle Régis, agent d’entretien au château de Versailles. Timide, Violette le déteste : elle trouve qu’il pue, elle décide alors qu’elle ne lui dira pas un mot. Dans les coulisses du Roi Soleil, la petite fille têtue et le grand ours vont se dompter et traverser ensemble leur deuil. Diffusion sur Okoo le 5 avril pendant cinq semaines puis sur France 4 le 12 avril à 18h30. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Oct 2024 | L'Amour ouf x Barbès, Little Algérie | 00:03:02 | |
2024 aura donc été pour le cinéma français, le retour aux ambitions. Et aux moyens accordés pour cela. Que ce soit pour rivaliser avec les blockbusters américains, en finançant Le Comte de Monte-Cristo, ou en alignant une trentaine de millions d'Euros pour L'Amour Ouf. Le nouveau film de Gilles Lellouche, est donc un film qui déborde. D'argent certes, mais surtout d'envies. De cinéma comme de romanesque ou de romantisme. L'épopée sentimentale de Clotaire le délinquant et Jackie la petite bourgeoise, revisite prolo de Roméo et Juliette dans le Nord français ouvrier des années 80 et 90 tient d'une boulimie, d'un surrégime volontaire. Au-delà de celui de ses personnages, L'Amour Ouf, c'est aussi celui de Lellouche pour le cinéma. Pour les réalisateurs, via une stylisation opératique, citant entre autres les Scorsese ou Coppola des grandes heures, comme pour les acteurs, au vu d'un casting offrant pléthores de seconds rôles – parfois jusqu'à la fugace apparition. Une générosité jusqu'au ras la gueule, parfois au détriment d'un film qui finit par s'essouffler ou à se perdre dans une sur-démonstration formelle, là où l'écriture aurait pu être moins éparpillée, mais qui pousse malgré tout à la sympathie par son envie de cinéma populaire ET spectaculaire ou celle d'entretenir pour mieux la porter la flamme d'une fureur de vivre adolescente. Des centaines de kilomètres séparent les Hauts-de-France de L'Amour Ouf de Barbès, Little Algérie, chronique de quartier qui venge au minimum des clichés ripolinés d'Emily in Paris. La redécouverte par un Franco-Algérien de retour à Paris de ses origines se débarasse de la sempiternelle vision pittoresque de Barbès pour en faire une enclave de solidarité méditerranéenne. Il y a quelque chose du cinéma néo-réaliste italien, en version blédarde, dans cette collection de vignettes socio-culturelles, par sa combinaison de truculence pour dépeindre une communauté pleine de vie et de gravité mélancolique via la peinture des affres identitaires des bi-nationaux. Sofiane Zermani (alias Fianso) y confirme sa mue de rappeur en acteur des plus doués pour incarner ces dualités. À travers lui, comme à travers une galerie d'attachants personnages se dépatouillant d'un système D, se diffuse un humanisme à la Ken Loach, mais aussi une passerelle inattendue avec L'Amour Ouf. Bien qu'à l'opposé économique ou de modestie. Barbès, Little Algérie s'y jumelle dans ce qu'ils dévoilent de leurs réalisateurs, Hassan Guerrar novice derrière la caméra, mais connu dans le milieu en tant qu'attaché de presse fort en gueule ou Gilles Lellouche se trimballant encore une étiquette de virilisme bourrin. Leurs films, autoportraits entre les lignes, tout en sensibilité et pudeur, sont aussi particulièrement touchants quand ils osent y tomber le masque, pour une même quête de reconnaissance. Voire d'amour. L'Amour Ouf / Barbès, Little Algérie. En salles le 16 octobre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
27 Jan 2021 | Retrospective Helena Trestikova | 00:04:34 | |
Un adage veut que La vie soit un roman. Pour Helena Trestikova, documentariste tchèque c'est aussi des (beaux) films égrenant le fil du temps. La cinéaste tchèque Helena Třeštíková développe une singulière esthétique de la rencontre. Elle filme avec une infinie patience des êtres et leurs familles – de cœur ou d’infortune – en revenant sans cesse auprès d’eux. Cette fréquentation assidue, fidèle, est une expérience commune d’observation participante, au plus près de la vie. Helena Trestikova observe des êtres qui cherchent leur place, souvent en rupture avec la société ; des lignes de vie plus forte que l’infamie ou le déterminisme social. L’issue est fragile, incertaine, mais la vie se révèle encore et toujours plus forte. Cette première rétrospective française de l’œuvre d’Helena Třeštíková met en évidence un cinéma qui s’élabore sur la (très) longue durée. Contemporaine des expériences longitudinales de Michael Apted (The Up series), Barbara et Winfried Junge (Die Kinder von Golzow) ou Michel Fresnel (Que deviendront-ils ?), Třeštíková travaille la sérialité documentaire selon des modalités précises. Au montage, elle ordonne chronologiquement chaque séquence pour restituer l’expérience d’une vie, dans la durée condensée du film. Le résultat est souvent vertigineux. Elle s’inspire d’une technique aussi ancienne que le cinéma, le résumé-accéléré ou time-lapse en anglais. Sur le site de la BPI (BIbilothèque Publique d’Information du Centre Pompidou) jusqu’au 6 mars/ https://www.bpi.fr Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
08 Jul 2021 | 74e FESTIVAL DE CANNES, Jour 3 | 00:02:54 | |
Une journée sous le signe de l’absence : d’un site de réservations de places qui finisse enfin par fonctionner, à celles, plus belles, de deux acteurs d’exception. Visuel © Affiche Festival de Cannes Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
28 May 2020 | « Miracle in Cell No. 7 » de Lee Hwan-gyeong | 00:02:52 | |
Le chemin est long entre la Corée du Sud et la Turquie, mais les bonnes histoires (et les bons films) n’ont pas de frontières. Yong-Goo, un handicapé mental est emprisonné pour un meurtre qu’il n’a pas commis. Ses voisins de cellule, criminels parmi les plus endurcis se prennent d’affection pour lui et vont tout faire, alors qu’il a été condamné à mort, pour que sa petite fille puisse lui rendre visite. Disponible sur outbuster.com Visuel © Affiche « Miracle in Cell No. 7 » de Lee Hwan-gyeong Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
19 Nov 2024 | Piece by Piece x La Passion selon Béatrice | 00:02:49 | |
On en aura décidément jamais fini avec les biopics de chanteurs. La liste de films revisitant en long, en large et en travers les parcours de stars iconiques ne cesse de s'allonger, souvent pour aligner les mêmes ficelles scénaristiques. Piece By Piece se distingue du lot. Sans doute parce que son sujet est, lui aussi, un cas singulier dans le monde de la musique : Pharrell Williams. Et plus encore par sa forme, puisque réalisé... en figurine Lego. Où en assumant d'être un documentaire, entre entretien central avec Williams et témoignages de ses proches. Le recours à l'animation essayant de traduire l'univers mental et philosophique de la star, tout en amenant une inattendue distance dans un registre souvent hagiographique. Pour autant, Piece By Piece passe souvent d'un rigolo trip Lego à un égotrip, quand il reste essentiellement à la gloire d'un artiste qui se considère comme un éternel outsider. Dès lors, les passages les plus intéressants mettent en parallèle des tubes aux mélodies et titres galvanisants, "de Get Lucky" à "Happy", et phases, à l'inverse quasi dépressives d'un Williams enchaînant les crises existentielles. Idem pour la peinture d'un music-business bouffi par l'argent et le cynisme, n'attendant des artistes que la répétition de recettes lucratives. Et même si à la longue, Piece By Piece se laisse gagner par une certaine monotonie - qu'il tente pourtant d'endiguer par un discours meta - ce drôle de biopic n'a de cesse, par son originalité formelle d'assumer son sujet profond, à savoir la préservation de la créativité dans un milieu qui ne jure que par le formatage. Autre personnalité atypique sur les écrans cette semaine : Béatrice Dalle. En surface, La Passion selon Béatrice l'emmène en périple mémoriel en Italie sur les traces d'une de ses idoles, Pier Paolo Pasolini. Le beau documentaire de Fabrice Du Welz prend rapidement un autre chemin : plus les rencontres avec de multiples intervenants esquissent un Pasolini comme le premier marxiste punk, plus la personnalité quasi jumelle de Dalle s'y superpose, plus c'est elle qui raconte sa philosophie de vie. Elle se propage autant dans la parole d'une femme à part que dans d'incroyables séquences sans mots, comme celle où Du Welz filme le visage de Dalle, lors d'une projection privée de L'Évangile selon Saint-Matthieu, où elle entre en état de quasi-fusion avec le film de Pasolini, le vivant littéralement dans sa chair, ses larmes. La Passion selon Béatrice est empli de ces moments à fleur de peau, observant Dalle dans une quête de soi sans concessions, mais allant à confession à cœur ouvert sur son parcours personnel. Le nôtre se serre définitivement dans une scène clôturant ce chassé-croisés entre deux âmes qui avaient tout pour être sœurs, où l'actrice en rencontre une autre, Rossano di Rocco, qui tenait le rôle d'un ange dans L'Évangile selon Saint-Matthieu. Leur étreinte, signe de reconnaissance mutuelle, d'une infinie tendresse, est une bouleversante épiphanie de cinéma. Piece By Piece / La Passion selon Béatrice. En salles le 20 novembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 Jul 2021 | BUENA VISTA SOCIAL CLUB | 00:02:21 | |
Alors que Cuba retourne dans la rue, le fameux documentaire sur la musique qui en est issue fait son retour en salles. Ry Cooder a compose la musique de Paris Texas et de The End of Violence. Au cours du travail sur ce dernier film, il parlait souvent avec enthousiasme a Wim Wenders de son voyage a Cuba et du disque qu'il y avait enregistre avec de vieux musiciens cubains. Le disque, sorti sous le nom de "Buena Vista Social Club", fut un succès international. Au printemps 1998, Ry Cooder retourne a Cuba pour y enregistrer un disque avec Ibrahim Ferrer et tous les musiciens qui avaient participe au premier album. Cette fois, Wim Wenders était du voyage avec une petite équipe de tournage. Visuel © Affiche Buena Vista Social Club Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 May 2024 | 77e FESTIVAL DE CANNES : MÉTÉO ORAGEUSE EN VUE | 00:02:03 | |
À Cannes, pour le moment, il fait beau, avec un ciel sans nuages, mais ça ne va peut-être pas durer. Alors que la météo annonce l'arrivée de la pluie d'ici à deux-trois jours, ce sont d'autres orages qui menacent cette édition. À vrai dire, on ne sait même pas d'où ils vont tomber : d'une possible grève initiée par le collectif Sous les écrans la dèche, qui rassemble toutes les petites mains du festival, en état de précarité de plus en plus prégnante, aux éventuels articles #MeToo autour d'une prétendue liste de prédateurs et de la venue annoncée du controversé directeur du CNC, bientôt en procès pour agression sexuelle. Cela pourrait tout aussi bien être un écho de la guerre à Gaza, ou même tout ça à la fois. Lors de la conférence de presse annonçant les agapes, son délégué général Thierry Frémaux affirmait que cette 77ᵉ édition du festival serait « pacifique, pacifiée et qu'on n'y parlerait que de cinéma », mais avant même son ouverture ce soir, cette déclaration est clairement devenue un vœu pieux. Quoi qu'il en soit, ce soir, le rideau se lèvera sur une édition qui, malgré elle, sera placée sous le signe d'un changement d'époque en cours. Il y a deux ans, la toute dernière scène d'un film de Quentin Dupieux, Fumer fait tousser, présenté ici, montrait un robot en plein bug quand il essayait justement de rebooter son époque. Ce soir, Le 2eme acte, nouvel opus de Dupieux sera projeté en ouverture. Comme souvent avec ce réalisateur, on ne sait pas grand-chose de son contenu, si ce n'est qu'il commenterait, autour d'un dîner entre quatre acteurs, et de manière très frontale, comment le monde du cinéma français gère la situation de crise actuelle, de la cancel culture à la révolution #MeToo. Seules certitudes, cela ne lui prendra qu'1 h 25, tandis que le festival est bien parti cette année pour passer beaucoup plus de temps à être l'épicentre de tous les débats sociaux du moment. Retrouvez Alex Masson au Festival de Cannes tous les matins à 7h37 dans la matinale "T'as vu l'heure ?" sur Nova. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
22 May 2024 | CANNES JOUR 6 : Hard corps | 00:02:51 | |
Au bout de dix jours de festival, le moindre accrédité a le sentiment d'avoir pris dix ans dans la vue, vit dans un état second, sous perfusion non-stop de café qui a fini par remplacer le sang dans les veines. Soit en parfait accord avec des films tournant autour du rapport à la mort ou au vieillissement. Dans The substance, une ancienne star de cinéma reconvertie en animatrice d'émission d'aérobic le refuse tellement qu'elle accepte la proposition d'une mystérieuse société qui lui fournit un clone rajeuni. Seule condition express, les deux versions doivent alterner leurs semaines de vie, et si l'une ne respecte pas la règle, l'autre se met à décrépir. Coralie Fargeat revisite donc Le portrait de Dorian Gray pour une mise à jour à l'heure d'un retour à l'obsession pour la célébrité et son endoctrinement des corps. L'idée est d'autant plus sensée que la réalisatrice a convoqué Demi Moore et Margaret Qualley, soit une actrice mise au placard et une valeur montante, en alter egos. Fargeat a eu l'intelligence de mettre de côté la charge contre les hommes (même relativement – il y a dans cette histoire un producteur de télécompilant tous les usages des prédateurs, qui, plus est, est nommé Harvey, comme un certain...Weinstein) pour se concentrer sur son pacte faustien, virant au mégacrêpage de chignon. Il reste dommage que The Substance se maquille comme un camion volé à coup d'effets tapent-à-l’œil où qu'il s'embarque dans un gorissime final grand-guignol, certes amusant, mais digressif. Toutefois, la rogne maintenue jusqu'au bout confirme que, même en se laissant aller au potache, les réalisatrices qui s'emparent du cinéma fantastique ne sont plus là pour jouer les potiches. On savait à l'inverse, depuis quelques films, que David Cronenberg avait mis de côté l'horreur graphique pour se concentrer sur celle plus intime. Sans pour autant renoncer à des concepts dérangeants. Les Linceuls invente une technologie permettant de rester en lien permanent avec les morts. Difficile de ne pas faire le lien entre un veuf qui refuse de faire son deuil et un réalisateur qui a lui-même perdu sa femme. Encore moins quand Vincent Cassel s'est fait la tête de Cronenberg jusqu'à la coupe de cheveux. Ce parallèle rend Les linceuls poignant, quand il est pétri de l'impossibilité d'adieux. Cette matière émotionnelle rabiboche avec un cinéaste dont les derniers opus devenaient de plus en plus stériles. Un réchauffement de maigre durée, Les linceuls se drapant dans une intrigue complotiste aussi fumeuse qu'abstraite, qui étouffe des théories passionnantes sur la subsistance des êtres face aux capacités des images virtuelles. Vincent Cassel et Diane Kruger offrent encore un peu de chair, mais les vraies larmes sont celles que l'on verse sur un Cronenberg qui embaume son inconsolable chagrin dans le suaire d'une trop grande rigidité. Pendant le Festival de Cannes, retrouvez tous les jours la chronique Pop Corn d’Alex Masson, notre envoyé à la croisette, à 7h37 dans « T’as vu l’heure ? », la matinale de Radio Nova. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Apr 2025 | Zion x Requiem for a Dream | 00:03:05 | |
A Pointe-à-pitre comme à Brooklyn, hier ou aujourd’hui, le rêve social est parfois un cauchemar. Les rapports entre la France métropolitaine et celle d'Outre-Mer n'ont jamais été simples. Encore moins en ce qui concerne le cinéma, basé comme énormément de choses sur un rapport d'import-export défavorable. En effet, si le cinéma conçu de ce côté des océans arrive dans les salles outre-marines, le trajet inverse est peu parcouru. La curiosité quand débarque ici un polar guadeloupéen est donc de rigueur. Zion est une immersion dans les quartiers de Pointe-à-pitre aux côtés de Chris, jeune branleur qui passe ses journées entre virées à moto, aventures d'un soir et petits jobs pour un dealer... Jusqu'au jour où il se retrouve à la fois avec un bébé largué devant sa porte et une livraison de dope qui tourne mal. Nelson Foix en fait une histoire de survies multiples, de Chris désormais traqué comme d'un quotidien dans une Guadeloupe précaire. Zion se dépêtre idéalement de plusieurs mythologies, celle d'un cinéma de genre à l'américaine, comme celle d'une maturité apportée par la paternité. La course de Chris est autant celle d'un gars qui apprend le sens des responsabilités que de celle d'une île qui tente de s'affranchir des restes du colonialisme. Du cinéma qui combine action et politique, rappelant dans sa virtuosité et son efficacité la vision d'un Kassovitz sur les banlieues avec La Haine, y compris dans une capacité à transcender un constat par un sens inné du rythme ou de la mise en scène. Zion se revendiquant tout autant film populaire et militant – ne serait-ce qu'en faisant de la place à la langue créole ou simplement en définissant sous son épiderme de thriller la réalité antillaise de la France, entre crise sociale et défaut de reconnaissance. Darren Aronofsky a trouvé, lui, une reconnaissance mondiale il y a 25 ans avec Requiem for a Dream, autre film s'essayant à une vision en coupe. Celle d'une Amérique du tout début des années 2000, via la descente aux enfers de quatre new-yorkais plus encore shootés à l'illusion du fameux rêve américain qu'à diverses drogues. Œuvre définitive sur les ravages des addictions, Requiem for a Dream superpose aux obsessions de son quatuor de défavorisés, celles d'une civilisation accro aux images. Aronofsky allant jusqu'à reformuler les grammaires narratives pour un trip expérimental d'une puissance folle confinant au vertige sensoriel. 25 ans après sa sortie, Requiem for a Dream stupéfie encore plus : sa part d’expérience hallucinogène s'est dissoute dans une Amérique prolo perdue entre ravages du fentanyl, règne de l'économie, et dévotion à un président tenant d'un affolant gourou. À l'époque de sa sortie, le film d'Aronofsky surpassait de très loin une petite vague de « drug movies » (de Trainspotting à Las Vegas Parano), aujourd'hui, il s'avère avoir surtout eu de l'avance quand il s'avère plus que jamais pulsation d'un monde défoncé, dans tous les sens du terme. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
26 Jan 2024 | "Queendom", portrait fascinant d'une performeuse drag intrépide en Russie | 00:16:38 | |
Jenna Marvin est à l'affiche du documentaire "Queendom", dont on vous a parlé dans la matinale de Nova il y a quelques semaines. Cette artiste Russe incarne la radicalité du mot Queer, dans des performances esthétiques mais aussi profondément politiques où elle est costumée en créatures à l’esthétique sombre, étrange et magnifique. Jenna performe en drag dans les lieux publics en Russie, un pays qui, bien qu'il ait d'abord dépénalisé l'homosexualité, mène une croisade contre toute forme d'opposition au pouvoir, d'autant plus depuis l'invasion de l'Ukraine en 2022, et contre la communauté LGBTQIA+. "La communauté a été qualifiée d'extrémiste et aujourd'hui, vous pouvez aller en prison pour avoir porté un badge avec le drapeau arc-en-ciel" résume la réalisatrice. La réalisatrice Agniia Galdanova façonne un portrait fascinant du courage et de l'audace de Gena, avec des scènes en tableaux de performances magnifiques, mais aussi sa vulnérabilité émotionnelle et physique alors qu'elle se bat pour sa liberté artistique. Un regard poignant et puissant sur la société russe contemporaine. La bande-annonce du film est ici. Le film n’a pour l’instant pas de sortie prévue en France, mais il est diffusé en exclusivité ce dimanche 28 janvier à 18h au Forum des images, en VO sous-titré, pour le festival “Un état du monde”. C'est la cinéaste Laura Poitras qui a choisi ce documentaire pour sa carte blanche. Nous, on vous offre un avant-goût, une interview de Jenna Marvin et Agniaa Galdanova, la réalisatrice du documentaire. On y a parlé communauté queer en Russie, costume politique, bande originale et meufs méga badass. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
07 Jul 2021 | 74e FESTIVAL DE CANNES, Jour 2 | 00:03:18 | |
Pendant que la salle Lumière tombe le masque, le rideau se lève sur les sections parallèles. Côté compétition, Tout s’est (effectivement) bien passé. Visuel © Affiche Festival de Cannes Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
24 Feb 2021 | Small Axe de Steve Mc Queen | 00:05:28 | |
Le réalisateur de 12 years a slave s’étale sur vingt ans de vie noire à l’anglaise. La preuve par cinq récits que tout individu est relié à une communauté. Autant mini-série que collection de films indépendants les uns des autres, Small Axe s’invite dans la communauté afro-caribéenne en Angleterre des années 60 à 80. Les tranches de vies muent en tranche d’histoire britannique : celle de l’intégration et du racisme systémique. Sur Salto, à partir du 26 février. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
17 Mar 2021 | Flesh Memory de Jean-Jacky Goldberg | 00:03:20 | |
Qu’y a-t-il de l’autre côté des écrans des cam girls ? De la chair, mais surtout de l’âme. Finley Blake est cam girl : elle gagne sa vie en faisant de l'exhibition sexuelle sur Internet, devant sa webcam. Elle a 33 ans, vit seule dans une maison isolée à Austin, Texas, et tente de récupérer la garde partagée de son fils qui lui a été retirée du fait de sa profession. Ce film est un documentaire qui la suit quelques jours dans sa vie, à la fois solitaire et très peuplée, tournée en grande partie vers des écrans qui sont son contact privilégié avec le monde. Visuel © Affiche "Flesh Memory" de Jean-Jacky Goldberg Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
23 May 2024 | CANNES JOUR 7 : Enfin, la compet’ ! | 00:02:20 | |
On ne va pas se mentir, Cannes 2024 ne devrait pas rester parmi les crus les plus éclatants. À vrai dire, l'industrie le savait avant même que cette édition démarre, au vu de projets ayant eu souvent du mal à être financés, de grands noms qui ne seront prêts que l'année prochaine, de cinématographies malmenées par des politiques fermant les robinets ou d'un cinéma américain qui doit encore se remettre de la longue grève des scénaristes. Le plus important festival de cinéma au monde ne pouvait qu'être la caisse de résonance d'un contexte morose. La chose semblait même entendue au vu d'une compétition jusque-là molle, entre films confus, anecdotiques ou ne sortant pas des rails usuels de leurs auteurs. Seul Emilia Perez,l'inattendue comédie musicale de Jacques Audiard, avait éveillé un intérêt de la foule cannoise. On pensait donc l'affaire pliée. Lorsque soudain, une triplette de films ont remis les pendules à l'heure. Coup sur coup, Paolo Sorrentino, Sean Baker et Miguel Gomes ont rappelé que Cannes est aussi une affaire d'excellence. Avec Parthenope, Anora et Grand Tour, les enjeux ont été relancés, avec la chronique d'une vie de femme napolitaine, une peinture de la nouvelle génération capitaliste déguisée en comédie policière, ou encore une course-poursuite rêveuse entre deux fiancés. Un tiercé qui a tout pour être gagnant lors du palmarès à tomber samedi soir, tant ils sont de forts candidats, au minimum concernant les prix de la mise en scène ou d'interprétation. Les choses ne sont pourtant pas si simples alors que ces films devront aussi passer le contrôle douanier de l'époque. Vrai qu'aussi sublimement mis en scène qu'il soit, le fond du film de Paolo Sorrentino est encombrant à l'ère #MeToo quand il sur-sexualise son héroïne ou laisse la plupart de ses personnages masculins effarés d'être face à une femme belle ET intelligente. Quant à la narration hyper arty de Grand Tour ou le rythme indolent d'Anora,ils vont à l'encontre des attentes d'un public de moins en moins patient ou ouvert aux expériences formalistes. Mais au minimum, on doit être gré à ses trois films d'avoir donné l'impression que la compétition (et les débats animés qui vont avec) vient enfin de commencer. Pendant le Festival de Cannes, retrouvez tous les jours la chronique Pop Corn d’Alex Masson, notre envoyé à la croisette, à 7h37 dans « T’as vu l’heure ? », la matinale de Radio Nova. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
29 Jul 2020 | THE CLIMB de Michael Angel Covino | 00:06:20 | |
Maillot jaune des sorties de cette été, une bromance remet à zéro les compteurs d'une amitié masculine. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Apr 2020 | « Microhabitat » de Jeon Go-Woon | 00:01:42 | |
Une disciple sud-coréenne du Jim Jarmusch bohème des débuts assure que l’enfermement n’est qu’une question de point de vue. A tout juste la trentaine, Miso, une sud-coréenne se laisse porter par la vie au gré des plaisirs qu’elle s’accorde : les cigarettes, le whisky et son mec. Lorsque les deux premiers subissent une phénoménale augmentation, il lui faut choisir entre eux et payer le loyer de son minuscule appartement. Elle n’hésite pas longtemps et se met à squatter chez divers anciens amis de collège… Disponible sur Outbuster. Visuel © « Microhabitat » de Jeon Go-Woon Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
31 Jan 2024 | Le bonheur est pour demain : l’amour emprisonné. | 00:19:19 | |
Avec Le bonheur est pour demain, Brigitte Sy creuse son sillon. Comme ses deux films précédents, Les mains libres et L'astragale, celui-ci est lié à l'univers carcéral, que Sy connaît bien pour y avoir longtemps travaillé. Mais surtout, la relation contrariée entre une jeune femme et un braqueur, bifurque par sa part de romantisme, vers une flamboyante histoire d'amour emprisonnée par les aléas de la vie. Et si en fait, c'était le véritable sujet du film, comme de sa réalisatrice ? Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
12 Nov 2020 | La compilation « Le cinéma policier français » de Jean-Ollé Laprune | 00:03:30 | |
Pour demander les papiers d’identité du cinéma français, un livre compliatoire qui ne s’astreint à un contrôle de routine pour enquêter sur un genre beaucoup plus vaste qu’on le croit. De 1901 à 2019, cent films policiers français pour mieux faire le portrait-robot du polar bien de chez nous. Une cartographie subjective (et généreuse) façon mise en examen qui préfère décloisonner les cellules d’un cinéma particulièrement varié, entre grands classiques et raretés ou perles oubliées. Paru chez Hugo Images. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
01 Jul 2020 | TOUT SIMPLEMENT NOIR de Jean-Pascal Zadi et John Wax | 00:03:58 | |
Qu’on se le dise, en ces temps d’interrogation d’un racisme systémique en France, le noir est une couleur qui va formidablement bien à la comédie bien de chez nous. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
13 Oct 2021 | Ultime combat, Arts martiaux d'Asie | 00:04:23 | |
Le cinéma d'arts martiaux asiatique a longtemps manqué de reconnaissance critique. Peut-être par mépris envers un cinéma dédaigné parce qu'estimé impur ou marginal alors qu'il aura été un des plus populaires au monde. Ou simplement par ce que considéré comme un vulgaire cinéma d'action pour prolos. À tort quand derrière les prouesses physiques, il s'est toujours attaché à l'enseignement des vertus de disciplines aussi mentales que corporelles. Depuis une trentaine d'année, le regard porté sur ce cinéma a évolué pour admettre sa richesse, sa complexité et surtout la pertinence d'une identité cinématographique, de son extension du cinéma burlesque à sa relation profonde avec l'histoire de l'Asie est ses mouvements sociaux. De très nombreuses rétrospectives lui ont rendu hommage comme sa noblesse. Une exposition vient renforcer la chose en mariant cinéma et collections du musée du Quai Branly. Il est assez pertinent que ce musée dédié aux arts et cultures primitives accueille un cinéma longtemps jugé primitif, au mauvais sens du terme, dans son rapport à la violence. Il y a même quelque chose de très beau à rattacher des objets traditionnels à des films, les faire se converser au gré des salles et des nombreux extraits pour lier spiritualité, légendes ancestrales et décryptage d'un art de vie guerrier. Les films sont remis en perspective avec les secousses des périodes historiques, délestant ce cinéma de sa réputation de spectacle bourrin pour les recontextualiser, expliquer la signification d'une technique ou d'un geste, révéler leur portée philosophique comme politique. La majorité des films choisis parlant en fait d'apprentissage, de transmission des traditions, de code d'honneur. Mais aussi de la modernité permanente de ce cinéma-là que ce soit par le rôle des femmes dans les films de sabre japonais ou hong-kongais ou dans l'incroyable complexité de scènes de combat plus virtuoses les unes que les autres. Il faut à ce titre saluer la scénographie de cette exposition, qui ne réduit jamais le champ ni le cadre des extraits à de simples vignettes. Au contraire, le choix a été fait de les présenter sur de grands écrans. Idem pour la hiérarchie, veillant à ce qu'aucun genre, de la kung-fu comedy au chambara ne soit négligé. Même quand il faut en passer par un passage obligé, par exemple l'évocation de Bruce Lee, la figure la plus iconique de ce cinéma, c'est par une salle spéciale, superbement dédiée aux mouvements du Petit Dragon, mais sans qu'elle écrase le reste. On pourra pour autant faire le petit reproche de l'absence de certains pays et cinématographies, comme la Thaïlande, l'Indonésie, ou le Vietnam alors que c'est aujourd'hui là-bas que les films d'arts martiaux connaissent désormais un renouveau, pour se concentrer essentiellement sur le cinéma et les cultures chinoises et japonaises. Mais après tout tant mieux, ça laisse de la matière pour une éventuelle future extension à cette exposition aussi foisonnante que remarquable d'intelligence rappelant que la philosophie est bel et bien un sport de combat. Ultime combat, arts Martiaux d'Asie. Au Musée du Quai Branly, jusqu'au 16 janvier Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
12 Jun 2024 | "THE SUMMER WITH CARMEN" x "CALIGULA, THE ULTIMATE CUT" : Fesse ce qu'il te plaît | 00:02:36 | |
Bientôt l'été, forcément la saison des chaleurs, donc moment propice pour aller à la plage se débrailler un peu. Demos, le personnage central de The summer with Carmen, passe beaucoup de temps sur celles d'Athènes. C'est là-bas qu'il cherche l'inspiration avec un ami de longue date pour écrire un scénario lui permettant de faire le deuil de sa dernière rupture amoureuse. Sur les rochers alentours, les hommes se dénudent très facilement, lui lutte pour se mettre psychologiquement à poil. The summer with Carmen réinvente la comédie romantique queer pour y ajouter de multiples tiroirs, où viendraient se ranger les cinémas de Xavier Dolan, Pedro Almodóvar ou Éric Rohmer. Le tout sans devenir une auberge espagnole, plutôt une salade grecque aux ingrédients idéalement dosés. L'identité gay en ressort solaire, d'un érotisme assumé à un discours déculpabilisant, plus dans une idée de déconstruction des clichés, y compris dans son alliance de fantaisie débridée et d'introspection existentielle. En 1979, l'ambition de Bob Guccione et Tinto Brass était tout autre quand ils se lancent dans Caligula. L'alliance d'un patron de la presse porno américaine et du plus érotomane des cinéastes italiens aura accouché d'un film monstre. Autant dans son idée folle d'un péplum de luxe ultra-désinhibé, excessif jusque dans son casting haut de gamme, réunissant autour de Malcolm Mc Dowell la crème de la crème britannique que dans sa Genèse des plus tumultueuses. Aux deux versions précédemment exploitées, celle de Brass déjà pas piquée des hannetons, et celle de Guccione encore plus dépravée, s'ajoute désormais une troisième, baptisée The ultimate cut. Elle est conçue à partir d'une centaine d'heures de rushes qui n'avaient pas été utilisées. Les scènes les plus trash des deux versions précédentes, qu'elles soient gores ou pornographiques en sont excisées, mais Caligula : the ultimate cut n'en est pas moins fou dans sa peinture d'un empire Romain en pleine dégénérescence. La décadence pointée du doigt par Brass et Guccione fait place à une vision quasi putride des enjeux de pouvoir autour d'un empereur aveuglé par l'amour incestueux pour sa sœur, retrouvant sa part de tragédie shakespearienne. Le stupre des films de départ s'est quelque peu dissout dans cet Ultimate cut, pas la démesure. Mieux que d'éviter à cette version-là un statut de curiosité, elle démontre la vertu principale du projet initial : transformer l'exploration d'un des plus grands cas de folie de l'histoire en monument de cinéma. The summer with Carmen et Caligula : the ultimate cut, en salles le 19 juin. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
30 Jun 2021 | "Sous le ciel d’Alice" de Chloé Mazlo | 00:03:24 | |
Au moment où la catastrophe Libanaise passe sous les radars, une attachante romance orientale ravive ses douleurs. Dans les années 50, la jeune Alice quitte la Suisse pour le Liban, contrée ensoleillée et exubérante. Là-bas, elle a un coup de foudre pour Joseph, un astrophysicien malicieux qui rêve d'envoyer le premier libanais dans l'espace. Alice trouve vite sa place dans la famille de ce dernier. Mais après quelques années de dolce vita, la guerre civile s'immisce dans leur paradis… Visuel © Ad Vitam Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
11 Oct 2024 | The Apprentice X Le Robot sauvage | 00:02:56 | |
Un mois. Le compte à rebours pour l'élection présidentielle américaine est lancée. Avec de vraies incertitudes sur le sort de Donald Trump. Au point que la sortie aux Etats-unis de The apprentice soit devenue un enjeu. La chronique des jeunes années de Trump auprès d'un mentor lui ayant enseigné la conquête du pouvoir serait-il trop partisan ? Pas si sur. La relation entre Roy Cohn, autre figure ultra-sulfureuse, grand prosécuteur du McCarthysme et son nouveau protégé est aussi un cours d'histoire américaine sur la transition entre deux générations, formées aux abus de pouvoir. A ce titre, The apprentice renoue avec les amers mais lucides constats de société que pouvait réaliser un Sidney Lumet dans les années 70. Dommage que la concision du scénario soit portée par une mise en scène scolaire de téléfilm pour HBO. A l'inverse le parfait casting, conforte bien l'idée d'un éternel cycle de la corruption morale : non seulement Sebastian Stan et Jeremy Strong sont exceptionnels en Trump et Cohn, mais surtout ce choix ricoche, sur leurs rôles précédents, Stan étant connu pour les Captain America, éloge Marvel de la démocratie et de la justice et Jeremy Strong pour son Roy Kendall, héritier aussi amoral qu' ultra tourmenté, dans la série Succession. Cette ironie mordante soutient l'idée centrale de The apprentice, bien moins biopic de Trump que mode d'emploi de la création des monstres engendrés par le capitalisme made in USA. Roz est à sa manière une autre machine de guerre économique. Ce robot domestique échoué sur les côtes d'une forêt terrestre va apprendre à se reprogrammer au contact d'une faune qui va lui révéler conscience et sentiments. Avec Le robot sauvage, Chris Sanders poursuit sa thématique fétiche déjà abordée dans Dragons ou Les Croods, à savoir comment la famille peut aussi être une source d'émancipation, que l'on soit parent ou enfant. Tout en s'aventurant sur le terrain d'un Wall-E, du Géant de fer ou du Château dans le ciel, par une écriture subtile dans le soin donné au moindre personnage ou cette capacité folle à donner âme à une machine mécanique. Plus ahurissants encore, le graphisme et l'animation entre fluidité totale et immersion physique absolue tenant quasiment d'un relief naturel. Tout comme Roz, doit apprendre à trouver sa voie, dans tous les sens du terme, Sanders confirme plus que jamais la sienne, celle d'un auteur à part au sein de la production hollywoodienne industrielle de cinéma d'animation. Mise à jour des grands récits initiatiques d'aventures à la Jack London, Le robot sauvage est appelé à devenir un indémodable classique. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
18 Nov 2020 | « Chroniques du Cinéma Confiné », le recueil du monde du cinéma sur son avenir post-confinement | 00:04:29 | |
Pendant que les salles sont fermées, le monde du cinéma réfléchit à son avenir dans un almanach du premier confinement Du 17 mars au 22 juin, les salles de cinéma ont été fermées. Mais pas l’esprit de son industrie : réalisateur, comédiens, attachés de presse, producteurs, critiques, techniciens et autres ont tenu un journal de bord du premier confinement pour conjurer leurs angoisses mais aussi exprimer d’une voix chorale ce qu’il espéraient du cinéma tel qu’il se fera dans le monde d’après. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
01 May 2024 | UNE AFFAIRE DE PRINCIPE x THE FALL GUY : EN COULISSES | 00:02:58 | |
Thriller juridique à la française ou reboot d’une série télé U.S, tout est une affaire de métier. Plus les élections européennes approchent, plus on voit remonter à la surface des problématiques d'ingérences et autres implications des différents lobbies au sein du Parlement. Une affaire de principe organise une visite guidée sur ce dernier point en réouvrant le dossier John Dalli, du nom d'un commissaire européen à la santé qui avait été démissionné de l'institution en 2012, suite au soupçon de magouilles avec l'industrie du tabac. Un certain José Bové, alors député européen s'était lancé dans une véritable enquête pour voir de quoi il en retournait vraiment. Antoine Raimbault s'en empare avec Une affaire de principe, pas tant pour relancer l'affaire que pour un double décryptage, du fonctionnement du parlement et des mécanismes de corruption. Soit un registre de thriller politique grand public à la française qui semblait mis au placard depuis les années 80 avec la retraite anticipée d'un Yves Boisset ou d'un Henri Verneuil, derniers grands représentants du genre. Raimbault en réactive l'efficacité avec un supplément de rogne civique faisant friser jusqu'à la moustache d'un Bouli Lanners, impeccable en Sherlock Bové. La ligne du film l'est peut-être un peu moins, quand elle s'écarte de son dossier pour aller vers une sanctification d'un député justicier drapé dans ses convictions citoyennes ou d'archétypales intrigues secondaires digressives du factuel de cette histoire. Pas de quoi tendre pour autant vers un conflit d'interêts, Une affaire de principe, film aussi divertissant que pédago, donnant plutôt envie d'autres exemples d'un cinéma mi-Cash Investigations, mi-Wikipedia, certes dogmatique, mais plus que jamais utile pour éclairer les zones d'ombres de plus en plus opaques de nos institutions. The fall guy revient lui aussi sur un vieux dossier en ressuscitant une madeleine de Proust de la télé américaine des années 80 : L'homme qui tombe à pic. Il n'est pas impossible que cette série sur un cascadeur, détective privé à ses heures aie nourri la vocation de David Leitch, réalisateur lui-même longtemps coordinateur des cascades de nombreux films d'action hollywoodiens des Matrix aux Jason Bourne. Sa version cinéma de la série n'a plus grand-chose à voir avec le matériau d'origine, si ce n'est la mollesse avec laquelle The fall guy essaie d'intégrer une intrigue policière inepte. Leitch rédige bien mieux une très généreuse ode au dévouement des cascadeurs, montrant autant les coulisses que le résultat de scènes aussi efficaces que spectaculaires. La véritable cascade de The fall guy à ne surtout pas reproduire étant ce scénario maniant très mal le dérapage contrôlé entre blockbuster pyrotechnique, comédie romantique et second degré. Le charme d'un Ryan Gosling déconstruisant, après Ken, la figure virile des Action Man n'étant pas suffisant pour empêcher de passer de Barbie à un divertissement amusant mais à la longue barbant. Une affaire de principe / The fall guy. En salles le 1ᵉʳ mai Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Dec 2020 | "The Wicker Man" de Robin Hardy | 00:04:46 | |
Le remarquable et séminal film d’épouvante anglais des 70’s réapparaît (normalement) mi-décembre en salles. Puisqu’on n’est pas sur que Noël sera autorisé cette année, autant célébrer la fête païenne qu’es "The Wicker Man", film à part dans le cinéma fantastique britannique, de ressortie dans une version inédite. Un vrai cadeau, donc. A la veille du 1er mai, sur un ilot écossais, un policier du continent enquête sur la disparition d’une fillette et se heurte à l'hostilité et au mutisme de ses habitants. Et s’ils en savaient plus sur ce mystère... Visuel © The Wicker Man de Robin Hardy Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
05 Feb 2024 | Moullet Jeunesse : le cinéma de Luc Moullet à encore de la cuisse | 00:19:32 | |
Vous l'avez entendu ce matin dans la matinale de Radio Nova, Luc Moullet est un cas particulier. Le moins connu des réalisateurs de la Nouvelle Vague est pourtant l'un de ses cinéastes les plus prolifiques, pour des dizaines de courts et longs métrages, moissonnant les genres les plus variés, du western au documentaire animalier, pour un regard sur le monde aussi amusé que sociologique. Un univers foisonnant, à mi-chemin entre loufoque et contestataire, lucidité et absurdité, rassemblée dans une rétrospective, bien nommée Moullet Jeunesse, puisqu'à 87 ans, ce réalisateur n'a rien perdu de son sens de l'observation, ni de sa cinéphilie. D'ailleurs, s'il est un homme de cinéma, c'est sans doute autant par son travail, qu'au sens littéral, quand les films ont participé à sa construction. La voici, la voilà, l'interview en version longue ! Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
04 Sep 2024 | Tatami x L’étrange festival | 00:02:47 | |
Il n'aura échappé à personne que les Jeux Olympiques et Paralympiques parisiens auront été aussi un marathon de la récupération politique, quitte à envoyer valser une demande présidentielle souhaitant que le sport ne soit pas politisé. Tatami se déroule loin de la Tour Eiffel en Georgie, pendant des championnats du monde de judo et met plus que pleinement sur le tapis ses enjeux. Quand la meilleure judokate iranienne risque de finir en finale face à son équivalente israélienne, les mollahs se mettent à faire pression sur l'athlète et son entraineuse pour qu'elle simule un désistement afin d'éviter un éventuel déshonneur à la république islamique. Tatami se déroule bien plus dans les vestiaires que pendant les matches. Logique pour un film qui veut parler de l'oppression qui se trame dans l'ombre. Et plus encore quand il est, chose impensable pour leurs gouvernements respectifs, co-réalisé par une iranienne et un israélien. Zar Amir Ebrahimi et Guy Nattiv se révèlent pour autant parfaits sparring partners, ce tandem inattendu procurant à Tatami à la fois un sens électrisant de thriller à suspense qu'un parfait cours de realpolitik. Il faudra être particulièrement sportif pour pouvoir cavaler entre les séances de L'étrange festival, qui réouvre ses portes cette semaine. La manifestation qui fête ses trente ans a depuis longtemps démontré son endurance dans l'envie de montrer et partager des cinémas hors des clous. Cette édition est donc à nouveau l'occasion de parcourir une cartographie de productions méconnues ou transgressives. Polar turc ou kazakh, science-fiction chinoise, actioner indien, animation australienne, film d'horreur autrichien, film fantastique français et bien d'autres encore sont conviés dans cette désormais rituelle sarabande, gargantuesque festin pour qui serait affamé d'images et pensées « différentes » du cinéma mainstream. Au delà de ce panorama d'inédits, on notera, parmi la floraison d'invités, les deux cartes blanches données à deux voix féminines françaises singulières, Coralie Fargeat et Noémie Merlant. La réalisatrice et la comédienne, ayant en commun, au moins dans leurs films, une volonté de parole émancipatrice des codes, y présenteront des films de leur choix, en phase avec l'essence de L'étrange festival : pousser les curseurs pour mieux ouvrir les yeux sur le monde. Et pour ceux qui ne seraient pas rassasiés, le bonus d'un livre édité pour les trente ans, revenant sur l'aventure de ce festival vraiment pas comme les autres, sera une manière supplémentaire de souffler les bougies. Tatami. En salles / L'étrange festival du 3 au 15 septembre au Forum des images, Paris Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
26 Feb 2025 | À bicyclette x Creation of the Gods II | 00:03:05 | |
Se remet-on du deuil d'un fils ? Probablement jamais. Mais il faut essayer de vivre avec sans oublier. Matthias Mlekuz a décidé de placer ses pas dans ceux de son fils disparu. Ou plutôt de se mettre dans sa roue, en refaisant à vélo le dernier voyage effectué par Youri, de La Rochelle à Istanbul. Mlekuz, second rôle du cinéma français aussi discret que durable, embarque avec lui Philippe Rebbot, autre comédien familier, son chien et une caméra. Ce road trip funéraire aurait pu donner lieu à un home movie, un carnet de route sur le processus de deuil, de compréhension d'un geste incompréhensible. À Bicyclette est bien d'autres choses quand ce périple va se doubler de l'introspection d'une amitié, prendre le chemin d'une tragicomédie libératrice pour ces deux sexagénaires partant à l'aventure. La crainte du déballage voyeuriste s'efface vite pour cette grande vadrouille à deux, improvisée selon les cahots du parcours, les coups de blues et les fous rires, les engueulades et les embrassades. Bien sûr, le but de ce voyage est thérapeutique pour Mlekuz, mais il devient cathartique pour ces deux pieds nickelés préparés à rien. Film décidément inattendu, À Bicyclette, parvient à transformer l'impudeur de filmer sa souffrance par une mini-odyssée tout en tendresse et transcende une douleur intime en concentré d'humanité, la recherche d'une consolation en récit de transmission. Le plus émouvant n'étant pas la progression vers l'apaisement d'un père désormais orphelin de son fils, mais la conjuration de cet inextinguible chagrin par une infaillible camaraderie. À Bicyclette trouvant même une vitesse de croisière dans le mantra que s'échangent Mlekuz et Rebbot au gré de la route : "si on peut, soyons joyeux". Avec Creation of the Gods 2 : Demon Force, le cinéma chinois s'essaie à construire une route vers le public occidental. Difficile de ne pas voir dans ce blockbuster d'héroïc fantasy, un instrument de soft power pour le régime de Xi Jiping. Comme en a attesté une projection de presse affublée d'un discours d'ambassadeur, scrutée par une armada de caméras probablement chargée de rapporter la bonne parole au parti. Pour autant, il faut bien reconnaître que ce potentiel cheval de Troie commercial sait ne pas trop appuyer sur un discours propagandiste ou politique pour se concentrer sur le spectaculaire de scènes d'action ou d'un rythme digne du Seigneur des anneaux. Se payant le luxe de sous-intrigues bien écrites, évitant de bâiller devant un récit sommes toutes limité à un combat des forces du Bien contre celles du Mal, Creation of the Gods 2 parvient même à renouer avec la chair du cinéma d'aventures old school, celle qui s'est justement évaporée dans les superproductions hollywoodiennes équivalentes, toujours plus désincarnées. Plutôt maligne, cette nouvelle étape d'une volonté de conquête culturelle, s'avère efficace quand elle conjugue à la fois exotisme et reconnexion à un très plaisant divertissement populaire. À Bicyclette / Creation of the Gods 2 : Demon Force en salles le 26 février. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
30 Sep 2021 | Candyman : la vie en noir | 00:03:02 | |
On ne le rappellera jamais assez, le bon cinéma d'épouvante est celui qui n'a pas peur d'intégrer un rapport au réel, pour le commenter. C'était le cas en 1992 de Candyman, inattendue apparition d'un croque-mitaine qui surgissait pour éventrer à coup de crochet quiconque avait eu l'imprudence de prononcer cinq fois son nom. C'est plus encore le cas d'un film entre le remake et la suite qui débarque aujourd'hui. Les deux films conservent le même cadre, celui d'une cité HLM de Chicago, historique ghetto où a été parquée la classe ouvrière noire comme l'idée d'une créature issue de l'esclavage, revenue se venger éternellement. Les vingt ans qui séparent le premier Candyman de celui-ci ont fait le reste, laissant le temps d'infuser la dégradation des rapports entre blancs et noirs, comme les ravages de la gentrification dans l'Amérique contemporaine. D'autant plus quand c'est Jordan Peele, instigateur depuis Get Out, d'un cinéma d'épouvante prenant à bras le corps la question de la place des afro-américains dans la société qui le produit. Il assume pleinement la portée politique de ce nouveau Candyman, que ce soit en en ayant confié la réalisation à une femme noire, Nia Da Costa, ou en le truffant d'allusions, comme la présence dans la bande-son d'un morceau de Sammy Davis Jr, partisan de la cause noire qui avait fini par devenir supporter ardent de Nixon, justement titré... The Candy Man. Pas tant pour boucler la boucle que pour indiquer que l'Amérique se trimballe depuis trop longtemps ses rapports interraciaux. Cette réactualisation du film de 1992 troque sa part gore, par une mise en scène aussi habile qu'inventive, vers quelque chose de plus anxiogène, la prophétie d'une révolte coléreuse qui finira par engendrer des monstres au nom d'une bonne cause, qui ne peut plus se contenter de promesses. En faisant de son croquemitaine la mémoire d'une oppression contre les noirs qui ne veut pas être oubliée, ni être récupérée par une woke culture de hipsters blancs, ce Candyman là rend coup pour coup. En salles depuis le 29 septembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Apr 2024 | Riddle Of Fire : Retour en enfance. L'interview de Weston Razooli | 00:10:06 | |
Où se trouve l'aventure dans le cinéma américain actuel ? Sans doute du côté de Weston Razooli, réalisateur autodidacte s'étant lancé dans un drôle de pari avec Riddle of fire. Bricolé avec trois dollars six cents, ce premier film envoie une bande de marmots en quête de la recette parfaite de tarte aux myrtilles pour pouvoir accéder au code parental de leur console de jeu. L'occasion de revisiter une Amérique de fiction oubliée, à mi-chemin entre Twin Peaks et les productions Disney des années 60. Razooli renouant à la fois avec l'innocence enfantine et une mythologie à la Tom Sawyer, Mais surtout avec l'idée d'une foi organique dans un cinéma où tout est terrain de jeu et d'imaginaire et proposer une alternative au cinéma de divertissement américain actuel de plus en désincarné par les effets numériques. Mieux que de passer par le regard de gamins pour réinventer le monde, Riddle of fire invite surtout les adultes à se remettre à leur hauteur pour retrouver sa part chevaleresque comme sa potentielle magie. Weston Razooli, lui s'est invité au micro de Nova. En salles le 17 avril. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
03 Feb 2025 | God Save the Tuche X Presence | 00:03:11 | |
Et si ce qui rendait populaire une comédie tenait de ses anomalies ? Sur le papier Les Tuche ne rentre dans aucune case, et pourtant depuis 2011 et aujourd'hui cinq films, la famille la plus décalée du cinéma français est désormais devenue une sorte de doudou du public. Peut-être parce qu'elle a un effet rassurant sur une société de plus en plus clivée. Les Tuche, eux, font toujours bloc, gardent un regard très ouvert sur l'extérieur. Ils pourraient bien même être devenus une famille modèle d'intégration, quand on y trouve un couple qui reste soudé, une grand-mère qu'on ne met pas à l'Ehpad, un fils homosexuel ou une fille mère célibataire d'un enfant métis, sans que cela ne pose aucun problème. Les Tuche c'est à la fois l'esprit Bidochon et le bon sens progressiste dans un contexte fantasque. Cette fois-ci, les voici partis à la rencontre de la famille royale anglaise dans un cinquième opus qui, mine de rien, bouscule certaines règles. God Save The Tuche, pousse en effet le curseur un peu plus loin, la chronique bienveillante de la France profonde s'ouvrant plus pleinement à des gags exogènes donnant visa aux univers des Monty Python, Nuls ou Robins des Bois (l'implication plus conséquente d'un Jean-Paul Rouve, ici devant et derrière la caméra ainsi qu'à l'écriture, expliquant peut-être cela). De quoi propulser God Save The Tuche vers un ton encore plus particulier où le fil rouge d'une intrigue n'a plus aucune importance, le récit se faisant roue libre, ravi de faire des sorties de route, d'expérimenter parfois jusqu'à l'épuisement, des vannes et situations toujours plus absurdes ou enfantines. Là où le volet précédent se perdait à essayer avec trop sérieux de raconter quelque chose autour de l'esprit de Noël, celui-ci s'assume comme pur exercice pataphysique au service d'une poésie du loufoque aussi hilarante que ronge-cerveau. À ce niveau de singularité, on peut même commencer à parler de French Tuche. La touche Steven Soderbergh tient, elle aussi, à l'envie de sortir des clous. Depuis Sexe Mensonges et Vidéo, le réalisateur américain n'a jamais cessé de contourner, désosser les codes narratifs ou de production pour des films aux airs de prototype. Avec Présence, il s'attaque au film de fantômes pour en renverser les proportions : le point de vue unique sera celui d'un spectre qui observe l'installation d'une famille dans une maison. Sans révolutionner le principe de la caméra subjective, cette idée de mise en scène immersive est brillamment orchestrée au point d'embobiner le spectateur qui ne se rend pas compte du leurre : Présence exprime avant tout une famille disloquée, aux membres de plus en plus éloignés les uns des autres, rassemblés uniquement par une maison aux fondations plus solides que les leurs. Décevant pour ceux qui s'attendraient donc à un pur film d'épouvante, Présence sait cependant faire parcourir un véritable frisson : celui d'une inattendue mélancolie en assurant que les vertus rassurantes du Home Sweet Home cher aux américains sont devenues fantomatiques, ne peuvent plus protéger les cellules familiales des barreaux d'une crise de civilisation. God Save The Tuche, Présence. En salles le 5 février. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
28 Oct 2021 | « Las niñas » : adolescence à l’espagnole | 00:02:48 | |
Sous les jupes plissées et les socquettes d’une bande de collégiennes des années 90, une chronique de l’émancipation de l’Espagne. Fait incontestable : l'adolescence et le cinéma ont toujours fait bon ménage, que ce soit par des pans entiers de films sur cet âge pas si tendre ou par une production pléthorique lui étant directement adressée. Reste qu'il ne suffit pas de faire un film sur des ados pour savoir capter toute la complexité de cette période formatrice, ou ne pas sombrer dans certains clichés. Ce n'est pas le cas de Las niñas. Peut-être parce que cette chronique d'une bande de gamines a Saragosse au début des années 90 explore aussi un pays lui-même alors en pleine phase de transformations profonde. Le premier film de Pilar Palomero a un évident goût de vécu, piochant très probablement dans les souvenirs de la réalisatrice mais surtout celui d'une Espagne, qui comme son personnage principal etait traversée par des envie de libération, d'émancipation. Quelque part c'est une adolescence plus globale, d'un pays, délivré du franquisme depuis une petite poignée d'années, mais qui ne s'était pas encore débarrassé de certains réflexes, n'avait pas tout à fait acquis le mode d'emploi du progressisme qui est au centre de Las niñas. Palomero a la justesse d'entremêler l'intime de Celia, élève trop sage d'une école catho bousculée par l'arrivée d'une nouvelle copine bien plus effrontée et donc une vision sociale en coupe, pour raconter ce mélange d'euphorie et de trouilles de pousser certaines portes, de pouvoir enfin jouer avec les interdits. Mais aussi comment il était nécéssaire de rompre une chrysalide purement espagnole, découvrant la démocratie mais encore sous l'égide d'une Église encore très prépondérante. Las niñas ne se concentre pas pour autant sur une génération de filles tout juste pubères, cloitrées sous l'uniforme jupes plissées et socquettes. Ça a beau être un film se déroulant dans les années 90, il observe aussi le monde de 2020, ce moment où les libertés et droits des femmes sont remis en question. Filmer avec un incroyable naturel des gamines d'aujourd'hui jouer celles d'hier, dans des gestes de découverte, des premières fois, que ce soit fumer une clope en douce ou avoir un gros crush amoureux fait ce lien. S'attarder sur l'éducation par des mères naturelles et celles religieuses aussi, par cette demande aux spectateurs d'aujourd'hui de ne pas oublier que les injonctions sociales d'hier n'ont pas forcément autant bougé qu'on le pense aujourd'hui. À sa manière, Las niñas fait une prière, celle de continuer à veiller à l'émancipation , des petites comme des grandes filles. En salles le 27 octobre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Jul 2021 | 74e FESTIVAL DE CANNES, Jour 4 | 00:02:59 | |
La place des femmes à Cannes 2021 ? Pas encore 50/50 mais ça avance… Visuel © Affiche Festival de Cannes Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
22 Jan 2025 | Better Man X Vol à haut risque | 00:03:20 | |
Est-ce qu'on en finira un jour avec les biopics de chanteurs ? Visiblement non. Pour preuve, l'arrivée cette semaine sur les écrans de Better Man consacré à Robbie Williams. Pour tout dire, on en bâillait d'avance, peu convaincu par l'idée de revenir sur le parcours de l'ex-membre de Take That, de son enfance à sa starisation ou ses heures de bad boy faisant la une des tabloïds. Pour autant, un détail rendait ce cas singulier : Williams y est portraitisé sous les traits d'un singe en image de synthèse. Pourquoi cette idée farfelue ? Même si Better Man est narré par Williams lui-même, la chose ne sera jamais explicitée, si ce n'est au titre d'une exubérance de plus. Si elle est minimisée par un scénario suivant à la lettre les règles de son registre (en gros un traumatisme global lié au manque de considération de Williams par son père ou le passage obligé d'un gros chagrin quand sa mamie adorée meurt), Better Man n'en reste pas moins à part dans l'univers des biopics musicaux, en n'ayant pas peur - à l'inverse des ultra-platounets Bohemian Rhapsody (Freddie Mercury) ou One Love (Bob Marley), pour ne citer qu'eux - d'une franche créativité lors de numéros musicaux dantesques. Les tubes de Williams, comme "Rock DJ" ou "She's the One" donnent lieu à des scènes délirantes, préférant les sommets graphiques des plus spectaculaires comédies musicales au déroulé usuel d'un récit connu d'avance. À l'image d'une phénoménale séquence de concert se transformant en bataille médiévale façon Seigneur des Anneaux autour de "Let Me Entertain You", Better Man, film étrange, a le mérite d'être souvent un show des plus divertissant. S'il y a une personnalité qui aurait bien de quoi nourrir un bon biopic, c'est bien Mel Gibson, star ultra-populaire dans les années 80 et 90, devenu paria suite à des déclarations très problématiques. Elles avaient fait oublier que Gibson est aussi un réalisateur particulier, alignant Braveheart, modèle de film historique épique, La Passion du Christ, biopic gore en araméen de Jésus ou Apocalypto, extraordinaire survival chez les mayas. Il n'est pas improbable qu'une mauvaise réputation acquise ait empêché Gibson de se lancer désormais dans des projets de la même ampleur. Il réapparait aux commandes de Vol à haut risque, thriller en huis clos ressuscitant, jusque dans son titre, le cinéma d'action américain des années 90. Soit le décor quasi unique d'un avion de tourisme embarquant une agent du FBI, un témoin à protéger et un tueur à gages chargé de les éliminer. Un exercice de style inattendu pour un réalisateur qui privilégiait jusque-là les grands espaces et l'emphase pour s'enfermer dans la carlingue étroite d'un coucou. De quoi privilégier un trio d'acteurs – surtout Mark Wahlberg, inattendu en tueur aussi dégénéré que survolté, s'en donnant à cœur joie. Vol à haut risque tenant de la voltige économique en étant totalement déconnecté du marché actuel, plus proche de l'altitude du haut du panier des séries B qui sortent directement en vidéo ou sur les plateformes de VOD que de celles des blockbusters en pilote automatique. Ce qui en fait pour autant une curiosité marrante, agréable trou d'air dans la routine des sorties, façon plaisir régressif devant une séance de cinoche à l'ancienne, nerveux et efficace. Et dans des fauteuils plus confortables que celle des soirées vidéo-club d'antan d'où ce sympathique thriller semble exhumé Better Man / Vol à haut risque. En salles le 22 janvier. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
20 Dec 2024 | Au cœur des volcans x Nosferatu | 00:02:59 | |
L'idée d'un volcan est celle qui peut s'associer le plus au cinéma de Werner Herzog. Depuis le début des années 70, ce cinéaste allemand n'a cessé de signer des films en ébullition, que ce soit dans leurs sujets ou leur conception, transformant leurs tournages en épopées épiques ou conflictuelles, pour un résultat tumultueux, à la fois lyriques et intérieurs, démesurés et philosophiques. Soit un cinéma aux allures de lave en fusion, incandescent, dangereux et inarrêtable. Ce magma qui gronde depuis plus de cinquante ans devait en toutes logique croiser les aventures de véritables vulcanologues. Ce sera Katia et Maurice Krafft, un couple qui se sera baladé sur la planète jusqu'à trouver la mort lors d'une expédition au Japon en 1991. Ils avaient laissé derrière eux près de 200 heures d'images, Herzog les a décortiquées, réassemblées pour le bien nommé Au cœur des volcans, requiem pour Katia et Maurice Krafft, portrait qui tient plus d'une course que d'un biopic, tant les Krafft semblent y échapper à un funeste destin, quand ils embarquent en bateau quelques minutes avant une éruption en Indonésie où réchappent de justesse d'un nuage toxique provoqué par une autre en Alaska. Herzog rendant tout autant compte de la manière dont leur filmage des volcans évolue, capturant la beauté hypnotique des volcans en actions comme leurs conséquences sur la nature et les populations environnantes. Mais tout autant la dévotion des Krafft à une curiosité qui les aura menés jusqu'à la mort, par envie d'aller au plus près de la lave, jusqu'au sacrifice. C'est probablement cette combinaison entre héroïsme vain et inconscience suicidaire qui a convaincu Herzog de s'attaquer à ce film fou par ses images comme par les fascinantes personnalités nourrissant une seule et même fournaise. L'écho d'Herzog se retrouve forcément dans une nouvelle version de Nosferatu, qui sera en salles la semaine prochaine. En 1979, le réalisateur allemand s'était attaqué à un remake du classique de Murnau, lui-même inspiré du Dracula originel, celui écrit par Bram Stoker. Robert Eggers y revient avec la même idée d'en extraire non pas l'essence horrifique, mais celle romantico-sexuelle via l'emprise fiévreuse du vampire sur une jeune femme. Chez Herzog, c'était Adjani qui lui donnait corps, dans cette nouvelle version, c'est une phénoménale Lily-Rose Depp, sous claire influence de l'actrice française, notamment lors d'impressionnantes séquences de transe. Quoiqu'il soit encore présent via la performance hantée de Willem Dafoe en Van Helsing du jour, on pourra cependant regretter le sens du chaos qui possédait les films précédents d'Eggers, de The Lighthouse à The Northman, son Nosferatu, bien moins furibard, n'en reste pas moins un formidable conte gothique d'hiver pour adultes, par sa collection de somptueuses images, parfaite galerie de tableaux animés ou sa trajectoire vers un mélancolique final tragique, qui, contrairement à son décevant vampire, manquant étonnamment de mordant quand il n'est résumé qu'à une silhouette, a tout pour devenir mémorable. Nosferatu, en salles le 25 décembre / Au cœur des volcans : Requiem pour Katia et Maurice Krafft, en salle le 18 décembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Nov 2021 | "A Good Man" : Le parcours d’un homme trans pour porter un enfant | 00:08:58 | |
Depuis quelque temps le cinéma s'est emparé de la question de la transidentité. D'entre autres Girl à Petite fille, le sujet est sorti du bois. Dans le cas d'A good man, il est même peut-être devenu un arbre cachant une autre forêt. Marie-Castille Mention-Schaar y filme bien le parcours d'un homme trans ayant décidé de porter l'enfant que sa femme, stérile ne peut avoir, mais pour porter le débat ailleurs : vers le droit à la normalité pour les histoires d'amour de couples non-cisgenres. Mine de rien, c'est une autre forme de progressisme et de reconnaissance qui est ici en jeu. Le sens habituel de la pédagogie bienveillante de la réalisatrice (Les héritiers, Le ciel attendra ou la coécriture du scénario de La première étoile) est un bon atout pour ça. Bien sûr, le choix d'une femme pour interpréter Benjamin reste questionnable, mais ce serait faire un mauvais procès d'intention à Schaar d'aller sur ce terrain-là. Au minimum parce que c'est Noémie Merlant, actrice à qui on peut accorder le crédit, via des films – Curiosa, Jumbo, Portrait d'une jeune fille en feu ou tout récemment Les olympiades- de rôles réfléchissant littéralement corps et âme à la recomposition du sentiment amoureux qui endosse ce rôle particulièrement casse-gueule. Mais aussi parce qu'en pliant aux codes d'un cinéma romantique une identité sexuelle loin des cases traditionnelles, A good man vise à aller au-delà des normes sociales, avec la volonté d'intégrer les personnes transgenres à des problématiques très communes, du désir d'enfant à la difficulté de faire perdurer un couple. Ou, en l'occurrence, vouloir dépassionner un débat délicat en se focalisant sur une passion amoureuse entre deux êtres, quoiqu'ils aient dans le ventre. En salles le 10 novembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
28 Oct 2020 | « Forbidden Hollywood » | 00:03:02 | |
Hollywood a toujours aimé le scandale. Encore plus dans les années 20 ou TOUT lui était permis. Entre 1929 et 1934, Hollywood réagit à la crise en se lâchant. Peut-être un peu trop pour la censure qui y mettra le holà avec le Code Hays. Mais cette parenthèse (dés)enchantée a donné lieu à des films osant tout, au nom d’une liberté morale qui reste ahurissante encore aujourd’hui. La preuve avec un coffret de dix films en sens interdit. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
08 Jan 2025 | Avec “Personne n'y comprend rien”, Yannick Kergoat veut nous faire tout comprendre | 00:32:10 | |
Ce 6 janvier s'est ouvert un procès aussi important que peu ordinaire. Il porte sur le possible financement de la campagne de Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2017, par Muammar Khadafi. Pendant plusieurs années, Médiapart a enquêté sur ce qui serait un des plus grands scandales d'état. Après plus d'une centaine d'articles, ainsi qu'une bande dessinée, un film, Personne n'y comprend rien, remet en mémoire la chronolgie des évènements. Il est signé Yannick Kergoat, précédemment réalisateur des Nouveaux Chiens de garde, documentaire sur les rapports entre médias et pouvoir ou de La (Très) Grande Évasion sur un autre cas vertigineux, celui de l'évasion fiscale. Personne n'y comprend rien joint ces deux axes en étant autant le récit d'une affaire parmi les plus folles que de la manière dont aujourd'hui, le journalisme s'en empare. Personne n'y comprend rien. En salles le 8 janvier. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
24 May 2024 | CANNES JOUR 8 : La mode, la mode, la mode | 00:02:27 | |
À 24 heures du palmarès, les bookmakers de festival sont en berne. C'est un vrai pari de pronostiquer qui repartira de la croisette avec la Palme d'or dans ses bagages. Au minimum parce qu'il reste encore deux candidats à être montrés, La plus belle des marchandises, le dessin animé signé Michel Hazanavicius et La graine de la figue sacrée de l'Iranien Mohammad Rasoulof. Encore plus quand aucun film de la compétition n'a jusque-là pleinement fait l'unanimité. Toutefois, un grand gagnant peut d'ores et déjà être annoncé : l'industrie de la mode. La relation entre les grands groupes et le festival n'est pas nouvelle. Depuis que la fameuse montée des marches sur tapis rouge a été inventée, celle-ci est un showroom à ciel ouvert pour les grands couturiers, qui en retour y trouvent le catwalk le plus médiatisé au monde. Cannes y trouve son compte par une présence strass et paillettes dans toutes les gazettes de la planète. Mais ce rapport win-win prend cette année une nouvelle dimension. Après une première étape l'an dernier en accompagnant le moyen-métrage de Pedro Almodóvar en tant que producteur, Saint-Laurent est pleinement passé de l'autre côté des marches en finançant cette année trois films de la compétition, ceux de David Cronenberg, Jacques Audiard et Paolo Sorrentino. Une étape fondamentale autant pour Cannes que pour le monde du cinéma, où l'industrie du luxe est de plus prégnante. En plus des filiales de production, jusqu'à CAA, une des agences hollywoodiennes les plus puissantes, a récemment été rachetée par François-Henri Pinault, le patron du groupe Kering auquel appartient Saint-Laurent. À ce stade, il est inquiétant que la mode finance ce type de cinéma, parce que cela signifie à quel point des auteurs comme Audiard ou Cronenberg et d'autres ne parviennent plus à trouver de financements traditionnels, même si cela leur permet de continuer à faire des films. Mais il faudra scruter de près l'évolution rapide de ce phénomène -on pourrait tout autant mentionner l'importante présence financière de Chanel dans le budget de certains festivals nouvellement créés. D'autant plus quand une riposte ne serait tarder de la part de LVMH, qui vient créer 22 Montaigne entertainment, dédiée, elle aussi, à la production. Il n'est donc pas impossible que dès 2025 à Cannes, on regarde des films sous cette bannière… Jusqu'à faire de la compétition un porte-manteau de ces groupes ? On préfèrerait y découvrir, dans quelques années, un thriller économique qui raconterait les coulisses de leur nouvelle rivalité. Photo : L’équipe du nouveau film d’Almodóvar, Extraña Forma de Vida, avec Anthony Vaccarello, producteur et directeur artistique d’Yves Saint-Laurent, à Cannes en 2023. Patricia DE MELO MOREIRA, AFP. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
03 Nov 2021 | “Burning Casablanca” : chouffe Marcel ! | 00:03:07 | |
Une romance sauvage fait mijoter l’esprit de Tarantino et de Sailor & Lula. Maroc’n’roll ! À Casablanca, on appelle les bastons de rue le “Zanka contact”. C'est de l'argot marocain, mais ça sonne aussi vachement bien en français, “Zanka contact”, ça swingue, ça percute à l'oreille. La magie de la traduction des titres de films en français fait que celui du film d'Ismaël Iraki est devenu chez nous Burning Casablanca. C'est pas mal non plus, ça sonne à la fois comme une annonce de série B ou comme un album de punk-rock des 70's, quelque chose d'énergique, d'électrique en tout cas. Ça se confirme dès une première séquence rentre dedans. Ce dans tous les sens du terme quand le taxi de Raja, prostituée, s'encastre dans celui de Larsen Snake, rockstar aussi déchue que junkie. Une rencontre qui vire au coup de foudre entre ces deux écorchés à grande gueule. Les coups de latte qui les menacent viendront d'un client de Rajae, issu de la bourgeoisie, mécontent de ses services qui voudrait que son mac la corrige. À partir de là, Burning Casablanca met le feu a à peu près tout ce qui est à sa portée, enfournant dans son moteur autant un scénario saute-mouton à la Tarantino que l'esprit d'un David Lynch période Sailor et Lula, tout est combustible dans cette romance sauvage et épicée. Dans les festivals où le film est passé, il a même souvent hérité de l'étiquette inédite de “western tajine”. Ça se tient quand Burning Casablanca revendique aussi dans son décidément furieux melting-pot d'aller aussi piocher chez les westerns spaghettis, pas forcément ceux de Sergio Leone, plutôt ceux un peu plus râpeux, à base de traumas carabinés. C'est d'ailleurs de là que vient la véritable énergie du film, ce principe de base pour Rajae et Larsen de s'arracher à leur sort, de toujours partir en live, Burning Casablanca les y encourageant en étant filmé avec l'urgence d'une performance permanente, parfois excessive jusqu'à devenir un sacré souk, mais particulièrement généreux. Même quand il se perd un peu à force de changer les rues de son foisonnant bled de cinéma, il y a quelque chose d'une mèche allumée avec ce premier long métrage incandescent, au minimum pour la double bombe d'acteurs que sont Khansa Batma et Ahmed Ahmoud, aussi magnétique que sensuel tandem d'amants chauffés à blanc. En salles mercredi 3 novembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
07 Aug 2024 | MaXXXIne x We are zombies : Un goût d’années 80 | 00:02:50 | |
Les années 80 ne sont pas mortes. La preuve avec une revisite musclée des slahsers urbains et un film de zombies. Finalement, le cinéma c'est peut-être plus qu'autre chose une question de codes, de règles narratives. Et surtout de savoir comment les contourner, les détourner, pour mieux y revenir, rappeler qu'ils sont une base, un pilier. Encore plus quand il s'agit de films de genre. Ainsi MaXXXine et We are Zombies s'élancent comme des variations nourries d'envies de pas de côté et de références mais sans trop se perdre dans un discours meta de petit malin, lui préférant un premier degré à peine teinté d'ironie. Ainsi MaXXXine, dernier volet d'une trilogie dédiée à l'empouvoirement féminin revisite - après les univers du porno américain, du cinéma d'horreur indépendant ou du mélo dans les deux premiers films)-, celui des séries B urbaines des années 80 à travers une actrice prête à tout pour devenir vedette, quitte à être rattrapée par son passé et un tueur qui se met à dézinguer les starlettes. Hommage à la production américaine déviante MaXXXine s'évertue pourtant à raconter des évolutions parallèles, celle d'une femme désireuse de s'émanciper et d'un cinéma essayant de ne pas s'aseptiser, de maintenir une certaine rébellion. Soit quelque part, quelque chose qui n'est pas si loin du chant nostalgique d'un Tarantino et son Once upon a time in Hollywood. MaXXXine se rapprochant d'une version plus réaliste du rêve américain, parce que portrait plus rugueux, plus crasseux de son quotidien et ses désillusions. De son côté We are zombies s'assume en version ludique du film (donc) de zombies, tout en brocardant une époque libérale ayant anesthésié les valeurs : les cadavres ambulants étant sur le point de surpasser numérairement les vivants, ils sont devenus un nouveau prolétariat exploité, y compris par un trio de crevards réduits au trafic de morts-vivants devenus cobayes de l'industrie pharmaceutique. Plus anar que contestataire, We are zombies s'essaie à la comédie sociale, où la pulsion de dévoration serait issue du virus capitaliste. Pas de militantisme pour autant dans cette pochade canadienne, le ton est plus à la déconnade. Un petit filet de bile amère sinuant parmi les moments de bravoure gore ne laisse pour autant pas de doute sur l'idée d'un monde où ce serait aux vivants de se réveiller plutôt qu'aux morts. Du fond de sa tombe, George Romero, le fondateur de films de zombies ayant autant de cervelle que de tripaille, doit être ravi de cette descendance potache. MaXXXine / We are zombies. En salles. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
04 Jan 2024 | VERMINES : pris dans la toile | 00:02:18 | |
Le cinéma de genre français confirme sa belle chrysalide. Il faudra commencer l'année cinéma 2024 en jetant un œil dans le rétro sur 2023. Pas tant pour rédiger un top des meilleurs films que pour déceler au minimum deux tendances dans la production française. D'abord un accès enfin autorisé à l'imaginaire, à des univers qui poussent enfin les murs. De franches réussites comme Le règne animal ou Mars express ont affirmé qu'il était bien possible d'élargir le champ de vision. Ensuite, une réappropriation de territoire, celui de la banlieue, redevenue pour les cinéastes un sol politique, de Bâtiment 5 à Avant que les flammes ne s'éteignent. L'étape suivante pourrait bien être déjà franchie avec Vermines, film qui se place à la jonction de ces deux axes. Le premier long-métrage de Sébastien Vanicek hybride le film de monstre et la chronique urbaine en enfermant dans un immeuble HLM ses habitants et des araignées ultra-venimeuses qui prolifèrent à vitesse grand V. Et tout autant l'énergie des séries B fantastiques américaines et regard incisif du cinéma social européen, Vermines jouant sur une double échelle de Darwin en rapprochant espèce animale et catégorie de population pareillement rejetées par préjugés. La bande annonce est à voir ici Vanicek filme intelligemment cet enfermement, cadrant en quasi-scope son huis-clos resserré. Les détails du quotidien des cités, des murs lépreux aux ascenseurs perpétuellement en panne, mais aussi la solidarité d'un voisinage n'attendant plus rien du monde extérieur, n'en sautent que plus aux yeux. Tout comme les araignées, impeccable mélange d'effets numériques et artisanaux, dans cet inattendu conte moderne sur la survie, épatant quand il capture dans sa parfaite toile les peurs primitives et celles sociales, pour se demander lesquelles sont les plus flippantes. En salles depuis le 27 décembre Retrouvez le Pop Corn d'Alex Masson, tous les mercredis à 9h30 et en podcast ! Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
30 Oct 2024 | Monsieur Aznavour X The Killer | 00:02:57 | |
Les biopics de chanteurs, c'est désormais un peu comme la fashion week : on ne sait jamais vraiment quand ça s'arrête. Après ceux d'Amy Winehouse et de Bob Marley au printemps, en attendant ceux, plus intrigants, de Pharrell Williams, en lego ou de Robbie Williams incarné par… un singe en images de synthèse (!!!), voici celui de Charles Aznavour. Ce n'est rien de dire que l'on était intrigué par Grand Corps Malade et Mehdi Idir, jusque-là dépositaires de bonnes comédies sociales, aux commandes de ce projet. Et plus encore par Tahar Rahim, casté pour incarner l'auteur-interprète de "La Bohème" ou "Emmenez-moi". Malgré un maquillage un brin envahissant, comment pourtant ne pas clamer "vient voir le comédien" devant son impressionnante performance caméléon ? À l'inverse, la mise en scène, dans un même registre que La Môme, modèle clairement visé, souffre parfois d'un côté tape-à-l'œil. Sans doute pour éviter de regarder un peu trop près les raccourcis d'un scénario occultant nombre de moments clés de la vie d'Aznavour. Heureusement, c'est au profit d'une idée centrale, elle judicieuse, quand Monsieur Aznavour descelle un minimum une statue du commandeur de la chanson française par le portrait d'un homme avide de succès, quitte à y sacrifier sa vie de famille. Pas de quoi faire un film "formi-formi-formidable" – en dépit d'un casting de rôles secondaires, notamment Marie-Julie Baup, géniale en Edith Piaf qui lui l'est - mais au moins un biopic qui sort un minimum des clous pour ne pas être qu'une séance de karaoké. John Woo, lui y est retourné avec un auto-remake de The Killer. Le film qui avait fait connaître au monde entier le réalisateur hong-kongais est donc revu et corrigé 35 ans plus tard. Nathalie Emmanuel y reprend le rôle de tueur à gage tourmenté rendu iconique par Chow Yun Fat et Omar Sy celui du flic lui courant après. Woo pensait peut-être boucler la boucle en venant tourner à Paris ce remake d'un film originel en partie sous influence du Samouraï, le classique de Jean-Pierre Melville. Encore aurait-il fallu que cette nouvelle mouture ne soit pas sabrée par un scénario réduisant ses personnages à des caricatures, amplifiées par un casting unis dans un cabotinage digne d'un épisode de Capitaine Marleau. Il subsiste un savoir-faire dans les scènes d'action ou certains effets signatures de Woo, d'une vision romantique du Bien et du Mal ou un lâcher de colombes au ralenti. Rien qui n'évite cependant l'impression, d'être cette fois-ci pris pour des pigeons. Monsieur Aznavour /The Killer. En salles le 23 octobre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
29 May 2024 | MEMORY x SALEM : Du coeur à l'ouvrage | 00:02:30 | |
En cette époque particulièrement chaotique, toute dose d'empathie est plus que bienvenue. On la trouvera cette semaine au cinéma, avec un doublé de sorties pour autant inattendu. La période doit vraiment être redoutable pour que Michel Franco, cinéaste reconnu pour sa misanthropie profonde, signe avec Memory un film essentiellement tourné vers l'humain. En l'occurrence deux, une assistante sociale et un veuf. Ils se sont connus à la fac, se retrouvent des années plus tard à une réunion d'anciens élèves. Elle est une ancienne alcoolique jamais loin de replonger, lui vient se découvrir être atteint de démence précoce. Usuellement chez Franco, ce duo aurait sombré dans leurs failles et leurs traumas. Memory leur offre la force de s'émanciper de leurs milieux toxiques. Là où d'habitude ce réalisateur anesthésie à force de scénario retors et nihiliste, le voilà qui s'essaie au mélo doux pour cicatriser les plaies de deux écorchés vifs. Bien sûr, l'horizon sombre de la dégénérescence s'annonce, mais Memory émeut à s'efforcer d'être un film de réparation de corps et de cœurs brisés. Bande-annonce de Memory : https://youtu.be/_w6Wkui3A9c?si=tS0i-B0_X1-HvqNr Jean-Bernard Marlin, s'était, lui aussi, révélé capable d'un regard cru avec Shéhérazade, sidérant premier film autour d'un amour impossible entre deux minots marseillais. Salem démarre comme un Roméo et Juliette ado dans les quartiers nord de la ville. Djibril, le comorien et Camilla, la gitane, s'aiment au point de faire un enfant. La guerre entre cités va envoyer Djibril en prison, où il devient obsédé par l'idée de sa fille grandissant sans lui. Il en sort convaincu d'avoir le don de guérison universelle et que sa rejetonne sera une prophète pouvant sauver le monde de son cycle de violence. Porté par une envie de pacifisme jusque dans son titre, Salem sait pour autant que son vœu de transmission de bienveillance à la jeune génération est sans doute idéaliste. À travers la relation qui se noue entre un père et une fille, il propose pour autant une voie alternative, y compris dans un imaginaire de cinéma entremêlant film noir et néo-mysticisme. Cette alliance stupéfiante pour conjurer la malédiction des déshérités sociaux, reste peut-être un peu naïve face à la réalité des cités, mais la conviction de son réalisateur comme de son récit font léviter Salem bien au-dessus du cinéma naturaliste usuel. Bande-annonce de Salem : https://www.youtube.com/watch?v=hg_KzrEZDcQ Memory / Salem. En salles le 29 mai Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
06 Jan 2021 | ZONES HUMIDES de David Wnendt | 00:06:59 | |
Sous un épiderme trash à la John Waters, la version teutonne de La Boum rédige le manifeste féministe des adolescentes d’aujourd’hui. Helen est une adolescente non-conformiste qui entretient une relation conflictuelle avec ses parents. Passant la plupart de son temps à traîner avec son amie Corinna, avec qui elle transgresse un tabou social après l’autre, elle utilise le sexe comme un mode de rébellion et casse la morale bourgeoise conventionnelle. Après un accident de rasage intime, Helen se retrouve à l’hôpital où il ne lui faut pas longtemps pour faire des vagues. Mais elle y rencontre Robin, un infirmier dont elle va tomber follement amoureuse… En dvd/Blu-ray chez Extralucid films (https://www.extralucidfilms.com) Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
20 Feb 2024 | BYE BYE TIBERIADE : Histoires de famille, famille de l’Histoire. | 00:01:56 | |
Il y a trois ans, Lina Soualem, racontait l'impact du déracinement de ses grands-parents paternels, octogénaires qui se séparaient après soixante ans de vie commune dans Leur Algérie. Son nouveau documentaire, Bye Bye Tibériade fonctionne par effet autant inverse que miroir, en suivant le retour de sa mère, dans une Palestine natale qu'elle avait fui pour devenir actrice en France. Cette remontée des branches féminines de l'arbre généalogique est forcément une histoire de racines, celle de générations successives de femmes mais aussi celle de cette si singulière partie du monde. Le prisme de l'intime et de ses traumatismes qui émanent des archives familiales ricoche sur celui d'une Palestine aussi complexe que ce chemin vers une reconquête d'identité. Les deux s'entrelaçant au travers du récit d'une femme qui a décidé, il y a longtemps, de quitter sa terre pour échapper à un destin tracé par avance, superposé à celui d'un pays dont le sort reste plus que jamais entre les mains de ses colonisateurs. Les questionnements incessants d'une fille portant en elle un déracinement par procuration, dont elle est désireuse de s'en émanciper en visitant le passé dissimulé de sa mère, se font pour autant avec tendresse. Voire émotion quand elle se veut consolante des douleurs d'un ADN familial ou s'est implantée la géo-politique et ses tragédies. Bye bye Tibériade n'en est pas moins douloureux par les souvenirs et les regrets que ce dialogue fait remonter à la surface, mais c'est bien sa volonté d'apaiser autant que possible, des béances incurables que ce documentaire qui sait être autant journal de bord à la première personne que collectif, qui le rend particulièrement poignant. En salles le 21 février Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
10 Jan 2024 | "Si seulement je pouvais hiberner" | 00:01:45 | |
Le cinéma mongol montre de quel bois il se chauffe. Comment ça va à Oulan Bator ? Pas très bien quand on est Uzil, un ado qui se retrouve à avoir la charge de ses frères et sœur quand leur mère, partie pour trouver un emploi, les abandonne peu à peu. Encore moins quand un hiver bien au dessous de zéro commence à s'installer, et qu'il faut bien trouver de quoi alimenter le poêle pour se chauffer comme de quoi mettre dans celle pour se nourrir. Si je pouvais hiberner, le premier film dela réalisatrice Zoljargal Purevdash, va au charbon pour extraire de toute mélasse sentimentale ce récit de pauvreté important une poisse à la Dickens sous une yourte . Sans renoncer à sa part de mélo, il s'illustre avant tout par sa retenue, la dignité avec laquelle est filmée cette fratrie a qui est imposée un sens de la démerde pour survivre. Une combinaison de pudeur et d'émotionnel qui place d'emblée son réalisateur au même rang qu'un Ken Loach dans cette peinture des complexités d'un rapport de classe refusant l'apitoiement. Récit d'apprentissage, Si je pouvais hiberner s'imprègne aussi, sans doute par l'éducation japonaise de Purevdash, des délicatesses du cinéma humaniste nippon, d'Ozu à Kore-Eda par son sens de la distance ou de l'empathie. Aussi crève-coeur que chaleureux, Si je pouvais hiberner, très beau premier opus invite à suivre un talent évident de cinéaste qui ne peut que bourgeonner. Retrouvez le PopCorn d'Alex Masson, tous les mercredis à 9h30 et en replay ! Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
08 Dec 2021 | Ham on Rye : l’adolescence dans sa bulle | 00:03:39 | |
Dans le cinéma américain, on ne parle pas de films sur l'adolescence, mais de coming-of-age stories. C'est relativement intraduisible, mais pourtant très juste pour définir cette période-là, à la jonction entre deux âges, à la fois une sortie définitive de l'enfance et une en construction vers la conscience adulte. L'entre-deux, c'est justement ce qui pourrait définir aussi Ham on Rye. Et encore qu'il faudrait élargir les choses, quand le film de Tyler Taormina multiplie les pistes et les humeurs. Ce qui n'est en fait pas plus mal pour tenter d'incarner la multiplicité de l'adolescence. Tout en s'attachant à essayer d'incarner une de ses données essentielles : cette drôle de sensation entre suspension du temps et ennui consenti qu'est la contemplation. Et même là, Ham on Rye se dédouble en organisant la journée si particulière pour la jeunesse américaine qu'est le bal de fin d'année scolaire. La déambulation de plusieurs groupes de filles et de garçons se fait à la fois rêveuse et studieuse, s'imprégnant autant qu'il observe avec précision les rites de passage ou les tics de langage générationnels. Taormina ne chôme pas pour autant quand il organise une sorte de synthèse de tout le cinéma américain sur l'adolescence depuis les années 80, ressuscitant ici le bucolique banlieusard du Outsiders de Francis Ford Coppola tout en tamisant la même lumière ethérée du Virgin Suicides de sa fille. Sans oublier de convoquer à sa boum la précision sociale d'un John Hughes (Breakfast club, La folle journée de Ferris Bueller...) ou d'un Richard Linklater (Slackers, Génération rebelle...). Le tout dans une part brumeuse parfois anxiogène proche d'un David Lynch qui remettrait les pieds à la fois dans Blue Velvet et Twin Peaks. Ça fait du monde, mais après tout quoi de plus normal si l'on considère que l'adolescence, c'est aussi le moment où l'on vit en bande. Taormina ne se laissant pas dominer par ses influences, Ham on rye trouve sa propre identité dans l'espèce d'apesanteur qui s'en dégage, le film étant définitivement conscient de la volatilité de l'âge qu'il explore. Il se consacre du coup à son expérience en essayant de traduire physiquement l'écoulement du temps, de moments uniques et furtifs que sont les premières fois, mais que le souvenir ne rendra jamais éphémère. Ham on rye confirme à quel point ils sont précieux, y compris lorsqu'un des ados au sortir de cette journée singulière demandera à la cantonnade si tout ça n'était pas qu'un rêve, si tout le monde n'était pas en fait endormi. Aucun des autres protagonistes ne lui répondra, trop attaché comme le film à faire subsister encore un peu une certaine magie, rester encore un peu dans le cérémonial cotonneux d'une adolescence collective, qui a ici des airs d'entre-monde envoûtant. Ham on Rye en fait une bulle, fragile, gracieuse, mais qui n'ignore jamais qu'elle finira par éclater. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Dec 2021 | “White Building” : La gentrification, c’est aussi un chantier de cinéma | 00:04:56 | |
Ce sera bientôt l'heure des bilans cinéma de 2021. Évidemment, il y aura les tops des meilleurs films dans la plupart des journaux, une analyse - voire des prospectives - autour de la situation des salles provoquée par le Covid qui s'incruste encore plus que les masque FFP sur les visages. Et puis, probablement aussi un coup d'œil sur les sujets qui se sont tout autant installés de films en films. Sur ce podium-là, c'est peut-être bien la gentrification qui grimpera sur la première marche. De Gagarine à Candyman ou In The heights, l'embourgeoisement galopant des quartiers est devenu une toile de fond tendue sur les écrans. C'est encore plus le cas pour le cinéma asiatique qui s'est pleinement emparé de la question, de la Chine à Taïwan ou au Cambodge avec White Building. Le premier film de fiction de Kevich Neang s'attache à cet authentique bâtiment de Phnom Penh, qui a abrité l'histoire du pays depuis les années 60 : résidence pour fonctionnaires d'état sous Sihanouk, réquisitionnée par les Khmers Rouge, équivalent local des HLM, puis objet de spéculation immobilière avant sa destruction en 2017. Neang, qui y a grandi avant que l'appartement familial soit évacué avant que l'immeuble ne soit rasé, accompagne dans ses couloirs un trio de potes vingtenaires qui rêvent de prendre leur envol. Du coup, White Building, ça parle de destruction ou de construction ? Un peu des deux, et ce dès l'introduction : sidérant plan au drone de ce bâtiment en décrépitude, mais on devine bientôt à quel point il regorge encore de vies. Ou dans le principe de suivre en parallèle, les espoirs cette bande et les négociations avant démolition de l'immeuble. White Building navigue entre les deux comme à travers une double géographie, architecturale et humaine. Mais aussi à travers les cinémas, ce film flirtant avec celui de Jia Zhang Ke (Still life, Au delà des montagnes...), l'un des meilleurs observateurs de la société chinoise dont il prolonge l'immersion documentaire, auquel Neang ajoute la part rêveuse d'un Apitchapong Weerasethakul (Uncle Boonmee, Tropical malady...) lors de déambulations hypnotiques. Car le temps est un acteur à part entière de White Building, qui tente de freiner par son récit narcotique la rapidité avec laquelle, non pas un bâtiment, mais une génération, voire la métropole cambodgienne se transforme. L'atmosphère contemplative devenant du coup une inattendue forme de militantisme, une décélération luttant comme elle le peut contre une accélération économique. Aujourd'hui, on ne sait pas encore vraiment ce qui va se dresser à la place du White Building, les derniers échos parlent d'un casino d'une vingtaine d'étages construit par une compagnie chinoise. Avec ce film-là, Neang a pris de l'avance sur un beau chantier, renforçant les fondations d'un cinéma qui se préoccuperait de la cohabitation entre l'écosystème du capitalisme galopant et celui à échelle humaine. Sortie le 22 décembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
29 Dec 2021 | "Lamb" : 100% pure laine islandaise | 00:07:24 | |
María et Ingvar vivent reclus avec leur troupeau de moutons dans une ferme en Islande. Lorsqu’ils découvrent un mystérieux nouveau-né, ils décident de le garder et de l'élever comme leur enfant. Cette nouvelle perspective apporte beaucoup de bonheur au couple, mais la nature leur réserve une dernière surprise… Entretien avec Valdimar Jóhannsson, réalisateur du film.
En salles le 29 décembre Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
12 Jan 2022 | Dušan Makavejev, cinéaste charnel | 00:04:02 | |
C'est quoi être libre au cinéma ? La question se pose toujours aujourd'hui mais était encore plus prégnante dans les années 60, quand la plupart des pays se rebellaient contre des carcans sociaux, moraux ou politiques. En France, avant-même mai 68, la Nouvelle vague a donné le la d'un cinéma qui voulait tout faire voler en éclats. On en oublie souvent qu'ailleurs aussi, ce mouvement-là était en cours. Et forcément plus encore dans des endroits loin de connaître les 30 glorieuses. A minima dans des pays de l'Est étriqués par des régimes communistes. Dans ce qu'on appelait encore la Yougoslavie, on l'a appelé la Vague noire. Les films de Dušan Makavejev sont pourtant haut en couleurs, quand ils auront allumé une mèche transgressive, pour faire péter la forme et le fond. Embrasser le politique et l'érotique. De quoi refaire le portrait du régime du président Tito, façon tête à Toto dans des objets singulier tenant à la fois de la comédie féroce et du désespoir face à une société corsetée. Reste qu'à la longue, le cinéma de Makavejev se résumait surtout à quelques moments dantesque dans des films tournés loin de chez lui, comme ce Sweet movie resté dans les annales pour sa séquence où Carole Laure nue se roulait dans des hectolitres de chocolat. La réapparition de ses trois premiers long-métrages qui font rejaillir la sève d'un cinéaste bien plus provocant que ce qu'on pensait. L'homme n'est pas un oiseau, Une affaire de cœur et Innocence sans protection, culbute les principes usuels de narration. Ici on fait se chevaucher images documentaires et romance en milieu ouvrier, on zèbre de couleur les bobines du premier film parlant serbe, on perturbe un mélo avec des vrais-faux exposés de sexologue ou de médecin légiste. Trois déflagrations avant-gardistes avec lesquels Makavejev s' auto-intronisait enfant naturel de l'insolence d'un Jean Vigo et du surréalisme à la Bunuel, mais surtout s'imposait dynamiteur des règles à la manière d'un anarchiste théorisant la lutte des classes avec un mordant sens de la dérision ou celui d'une énormité rabelaisienne. Le tout traversé par une quasi-schizophrénie, quand qu'il s'agisse de raconter les amours fugitives d'un ingénieur et d'une coiffeuse, d'une employée des PTT et d'un dératiseur ou de retrouver un Mr Muscle vilipendé par le régime nazi, ce cinéma alterne pulsions de vie et de mort, l'obscène et la pureté. Le plus sidérant, au-delà de la découverte de ces trois films quasi-invisibles depuis leur sortie, reste la puissance formelle de leur avant-garde libertaire, l'audace encore intacte d'un triptyque resté bouillonnant. À la hauteur d'un cinéaste qui décrivait dans des interviews, la Yougoslavie comme un pays de Brigands, de pirates, d'hérétiques et de rebelles. Soit tout ce qui peut faire un cinéma vibrant, vivant, libre donc. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
19 Jan 2022 | "La maison" : Netflix ouvre les portes de son nouvel étage | 00:04:20 | |
Mine de rien, le cinéma d'animation connaît pas mal de chambardements ces temps-ci. La faute aux plateformes de SVOD qui viennent de confirmer en trois temps la place qu'elles ont prise dans ce domaine. Il y a d'abord Amazon prime qui s'est emparé du quatrième volet d'Hotel Transylvania, mis en ligne depuis la fin de la semaine dernière, la très sympathique licence transformant les grands monstres classiques, de Dracula à Frankenstein en poilante colonie de vacances étant désormais privée de sortie en salles française. Puis Disney qui vient de décider qu'après Soul et Luca, Alerte rouge le prochain Pixar n'y sortirait finalement pas, pour servir d'appâts à nouveaux abonnés pour Disney +, confinant ainsi la société qui avait, depuis Toy Story, créé un nouvel âge d'or du cinéma d'animation en fournisseur de direct to video. Face à ses tractations qui tiennent avant tout de la stratégie mercantile, on en viendrait presque à penser que Netflix joue une carte plus philanthrope avec la mise en ligne, elle aussi en fin de semaine dernière, de La maison. Cela, dit il n'est pas anodin que dans ce film à sketches, il soit beaucoup question de ravalement et de reconstruction. À vrai dire, il n'est pas une découverte que Netflix se jette dans un gros chantier autour du cinéma animation. Non seulement elle a ouvert un label, Netflixanimation, qui produit en interne des films plutôt réussis, comme La famille Willoughby, mais elle a aussi racheté des films consolidant leur cible jeune public, comme Les Mitchell contre les machines. Mais La maison marque peut-être une étape supplémentaire en s'aventurant sur un terrain plus complexe. Ce film omnibus s'écarte du jeune public, par une tonalité plus sombre, ou une animation moins lisse. En l'occurence en ayant commandé à quatre réalisateurs européens, cador de la stop motion (autrement dit l'animation de figurines et marionnettes) un triptyque aux airs gothiques, que ce soit celle d'une famille embarquée dans un pacte diabolique avec un mystérieux architecte, un rat aux prises avec toute sorte de vermine ou une chatte qui ne sait pas comment se débarrasser de locataires qui ne paient plus leur loyer. Une combinaison qui envoie le Wes Anderson de Fantastic Mr Fox ou des personnages à la Aardman, les créateurs de Wallace & Gromit dans les labyrinthes anxiogènes d'un Polanski voire d'un Lynch. Sans compter des invocations des univers de Michel Gondry ou Tim Burton. Le tout, manquant peut-être un peu de lien entre les segments – hormis leur décor commun de la maison du titre – rien ne les rattache totalement, mais absolument pas de cohésion dans l'aspect cauchemardesque ou névrotique. Et encore moins dans l'absolue perfection de l'animation. Ainsi les poupées de tissus du premier segment peuvent devenir de chagrin, ou la mélancolie du dernier se refléter dans les billes qui servent d'yeux à son personnage principal. Rien ne dit pour le moment si cette embardée vers une zone intermédiaire du cinéma d'animation entre fable grinçante pour ados et appel du pied vers un public plus adulte, la Maison Netflix s'est offerte un imposant étage supplémentaire. La Maison. Depuis le 14 janvier sur Netflix. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
26 Jan 2022 | "Municipales", "Les promesses" : et si on parlait enfin politique ? | 00:04:08 | |
Sans risquer la marge d'erreur des sondages du moment, il n'y a grand risque à décréter que la campagne présidentielle 2022 est d'une sidérante médiocrité. Mais quel que soit son résultat, elle aura au moins été bonne à une chose : jamais le cinéma français ne s'est autant emparé de la politique que cette année. D'ici à la fin du printemps va débarquer sur les écrans une salve particulièrement copieuse de films prenant très frontalement en compte cette question. Pour la plupart ce sont des documentaires, beaucoup ayant le rouge colère au front et bien sûr le gilet jaune, mais ce tir nourri lâche ses deux premières grosses cartouches aujourd'hui en se posant aussi la question de la fiction. D'abord d'une manière surprenante dans Municipale où Thomas Paulot envoie un véritable comédien dans une petite ville des Ardennes pour s'y présenter candidat à la mairie, tout en indiquant aux habitants que s'il vient construire un vrai programme, il n'y aura pas de mandat puisqu'il n'est qu'un acteur et non un politicien. Sauf que les habitants commencent à vraiment se prendre au jeu. Municipale interroge du coup formidablement ce qu'est devenu la politique politicienne aujourd'hui entre coups de communication et projets fantoches. Dans les salles d'à côté, il y a Les promesses, film qui s'assume pleinement comme une fiction, mais particulièrement en phase avec le réel. Isabelle Huppert et Reda Kateb y forment un inattendu duo de maire et directeur de cabinet dans une ville du 9.3. Elle s'apprête à passer la main et ne pas rempiler avant d'y retourner, meurtrie de ne pas avoir récupéré le poste de ministre qui lui était promis. On passera sur des péripéties autour d'un marchand de sommeil qui entretiennent la flamme du scénario pour s'attarder sur les braises qui chauffent Les Promesses : montrer l'action politique dans ce qu'elle a de concret, ne pas être tant dans les coulisses du pouvoir que dans la confrontation entre les ambitions personnelles et celles de réellement faire bouger les lignes, le flou entre l'ego et le légal, les limites de l'éthique et le toc d'une parole qui ne vaut plus grand-chose. Pour autant Municipale comme Les promesses ne sont pas là pour entériner le refrain du tous pourris. Plutôt de profiter de la force des faux-semblants du cinéma pour aller toucher une autre vérité, celle des territoires et des populations aux pieds ancrés dans le concret face au hors-sol des candidats. Sans avoir à tracter pour un parti ou un autre, ces deux films ravivent avec des nuances qui ont été englouties par les communicants, les petites phrases et les polémiques sans intérêt, les attentes des citoyens envers la classe politique. Mine de rien, ce double porte-voix d'une classe prolétaire, ouvre enfin de vrais débats, bien plus exigeants que les gesticulations médiatiques des authentiques candidats plus proches désormais d'influenceurs YouTube que de votes. On en a encore entendu il y a peu certains, faire leur cinéma en citant Bac Nord en appui de leur programme sécuritaire. Pour éviter de se prendre en pleine poire la très possible déflagration de l'abstention en avril prochain, ceux-là, comme les autres, seraient plus avisés d'aller voir Muncipale et Les promesses, films aussi remontés que lucides, pour avoir un réel instantané de ce qui est en train de se jouer. Municipale / Les Promesses. En salles le 26 janvier. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
27 Jan 2022 | La nouvelle chronologie des médias | 00:04:32 | |
La chronologie des médias, c’est la règle qui définit l’ordre de diffusion des films : d’abord en salle, puis en VOD, puis sur C+, puis les plateformes, puis les chaînes gratuites. Les discussions se sont prolongées jusqu’à tard dans la nuit de dimanche à lundi. Alex Masson, le spécialiste cinéma de Nova, vous explique ça. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
09 Feb 2022 | Douglas Trumbull : disparition d'un génie de l'ombre | 00:04:05 | |
Même si la semaine cinéma est particulièrement dense cette semaine (il y en a pour tout le monde, de ceux qui veulent s'intéresser à l'éthique journalistique ou politique avec Enquête sur un scandale d'état aux détracteurs de Marguerite Duras qui se réjouiront de voire déboulonner sa figure de monstre sacré pour devenir une créature toxique dans Vous ne désirez que moi. Mêmes les amateurs de film catastrophe aussi neuneu que rigolo ou de bonne comédie française ne seront pas volés avec Moonfall et Les vedettes), cette chronique va cependant baisser le rideau sur l'actualité salle pour raison de deuil, car Douglas Trumbull est mort. Douglas qui ? Bonne question. Elle est légitime et normale quand Trumbull fait partie de ces génies de l'ombre, des piliers invisibles qui ont contribué à faire devenir des films légendaires. Sans Douglas Trumbull, des classiques comme 2001, odyssée de l'espace, Blade Runner ou Rencontres du 3e type ne seraient jamais devenus les immortels classiques qu'ils sont. Trumbull y a révolutionné les effets spéciaux pour en faire une science. À l'époque ou l'ordinateur et les images de synthèses n'avaient pas encore rendu illimitées l'imaginaire visuel, lui avait magnifié par l'art des transparences et des maquettes la part d'illusionnisme des films à grand spectacle. Avec Trumbull, un Kubrick, un Ridley Scott ou un Spielberg pour ne citer qu'eux pouvaient voir plus loin tout en restant crédibles, organiques. Mais Trumbull ce n'était pas qu'un exceptionnel technicien. Il y avait quelque chose chez lui de l'expérimentateur indépendant, du laborantin explorateur des possibles. Mais surtout d'un outsider de génie, sorte d'aventurier libertaire de la technologie. Notamment en inventant des formats révolutionnaires comme le Showscan, fabuleux procédé de projection hyper réaliste au point de devancer de trente ans l'Imax ou le dolby atmos, d'être une sorte de relief visuel et sonore sans lunettes. Ou en amenant dans Silent running, un des deux seuls films de fiction qu'il a réalisés, scénarisé par Michael Cimino, l'esprit du Nouvel Hollywood dans un huis clos intime de science-fiction teintée d'écologie. Même quand la part visionnaire de ce Barnum extrayant de la poésie de ses expériences, s'est heurtée à une hiérarchie hollywoodienne qui n'a pas voulu de ses extraordinaires trouvailles, Trumbull ne s'est pas déparé de son côté professeur Tournesol/Géo Trouvetou mettant en pratique dans son studio laboratoire au fin fond d'un bois du Massachussets, d'incroyables prototypes. Ces dernières années, il était réapparu en fabriquant pour Terence Malick les stupéfiantes séquences de genèse du monde dans Tree of life, à partir d'images scientifiques et d'abstractions, mais il planchait surtout sur un concept qui aurait pu être une nouvelle révolution copernicienne du cinéma, des salles mobiles ou auraient été projetés des films dans un nouveau format, le Magi, encore plus immersif que James Cameron n'y arrivera jamais pour les prochains Avatar. Quelque chose qui aurait tenu du futur dans l'expérience de spectateur et d'un retour aux sources en revenant au principe d'attractions foraines du tout début du 7ᵉ art. Avec la disparition de Trumbull, il y a effectivement de la magie du cinéma qui se perd. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
16 Feb 2022 | Kinuyo Tanaka : une rétrospective autour d’une pionnière du cinéma japonais | 00:04:13 | |
Ce qu'il y a de bien avec le cinéma, c'est qu'on en a jamais fini de découvrir des films ou des cinéastes. Et nombreux sont ceux qui sont passés sous les radars, et surtout pas passés par les écrans français en ce qui concerne les cinématographies étrangères. Notamment celle japonaise, où des pans entiers restent à exhumer de ce côté de l'océan Pacifique. Par exemple, la carrière de Kinuyo Tanaka. Ici, on ne connaissait que son compagnonnage avec Mizoguchi pour qui cette actrice a tourné quinze films. Ce qui reste peu sur une filmographie qui en aura compté près de 250 et où s'alignent les plus grandes signatures, Mizoguchi donc, mais aussi Ozu ou Naruse. Tanaka aura été comme un fil rouge dans l'histoire de la production japonaise. D'une forte présence dans son cinéma muet à sa participation au premier film parlant, mais aussi en étant une de ses stars féminines pendant l'âge d'or des années 50. Tanaka aura suivi les fluctuations de cette industrie, jusque dans sa prestation pendant la seconde guerre mondiale dans des films de propagande, sa transition entre grand écran et télévision puis un come-back fulgurant dans les années 70. Un parcours quasi patrimonial qui ne saurait pourtant résumer la trajectoire de celle qui fut l'équivalent japonais, dans son jeu comme ses rôles de femmes fortes et complexes, d'une Bette Davis ou d'une Greta Garbo. Elle est même entrée officiellement dans l'histoire comme la seconde femme à passer derrière la caméra au Japon. Un choix forcément fort dans un milieu essentiellement masculin. Confirmation d'un caractère bien trempé pour une actrice qui avait défrayé la chronique à la fin des années 40 pour commettre le sacrilège de rompre son contrat avec un studio pour aller tenter une petite aventure hollywoodienne. Les six films qu'elle va réaliser entre 1953 et 1962 remettent les pendules à l'heure jusqu'à laisser se demander si Mizoguchi, un des mentors de Tanaka, ne lui devrait pas sa réputation de cinéaste féministe. Qu'ils s'essayent au néoréalisme ou à l'expressionnisme, naviguent admirablement entre mélo, drames historiques ou récits très contemporain, les films de Tanaka composent un exceptionnel portrait de la condition féminine. Jusqu'à se passer, après Lettres d'amour et La lune s'est levée, de scénaristes masculins. Là où sa carrière d'actrice lui offrit généralement des rôles de femmes aux destins funestes, Tanaka réalisatrice les fait se redresser, les incite à ne plus courber l'échine. Y compris autour de sujets jugés impossibles dans ces années 50 comme le cancer du sein dans Maternité éternelle. Elle abolit même déjà le patriarcat dans La nuit des femmes, où des prostituées reforment société en allant vivre en communauté en bord de mer. Au-delà même de ce discours de pionnière, l'intégrale qui sort cette semaine démontre aussi une impressionnante metteuse en scène, avec six films trop longtemps restée dans l'ombre, alors qu'ils sont à la hauteur des classiques mondialement reconnus où elle fut actrice. Étonnamment, elle ne tint jamais le rôle principal de ses propres réalisations, peut-être par écho du sentiment de sororité et de résistance qui émane de ce cycle, mais sa découverte, confirme à quel point devant ou derrière la caméra, Kinuyo Tanaka fut une héroïne. La rétrospective Kinuyo Tanaka est à retrouver dans les salles obscures à partir du 16 février. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
23 Feb 2022 | “Sous le ciel” de Koutaïssi | 00:03:36 | |
Saga fantasque d’une romance contrariée par le destin. Un film étonnant venu d’Europe de l’Est, qui dérègle les boussoles pour ne pas perdre le nord. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
02 Mar 2022 | “Ali & Ava” de Banar : à la croisée de la comédie romantique et du cinéma social | 00:05:36 | |
Il faudra bien un jour percer le mystère du cinéma social britannique. De Ken Loach à Andrea Arnold de The full monty ou Billy Elliott et bien d'autres. Il y a un savoir-faire inexplicable pour partir de la réalité des classes ouvrières pour les transcender en récits admirables ; pour malaxer un contexte et toujours en extraire une fibre humaniste. Une alchimie qui n'appartient qu'à ce cinéma-là jusqu'à en être devenue son adn. “Ali & Ava”, le nouveau film de Clio Barnard, connecte à la fois comédie romantique et racines shakespeariennes autour de la rencontre improbable entre une assistante sociale, irlandaise jusque dans les recoins de son accent, et un chauffeur de taxi d'origine pakistanaise. Il y aurait du Roméo et Juliette contemporain dans Ali & Ava ? Il y a de ça dans cette confrontation des cultures, une romance qui tiendrait encore aujourd'hui du sacrilège. Pour autant Ali & Ava se détache du destin funeste des Capulet et Montaigu. Que cela soit par une volonté claire de ne pas aller jusqu'au tragique, ou simplement pour le principe de se pencher sur des vies et des drames ordinaires. D'aller voir comment Monsieur et Madame adressent la complexité des questions culturelles ou raciales. Dans “Ali & Ava”, le “&” fait toute la différence en exprimant autant la difficulté d'être soi dans un groupe défini, que ce qui finit par réunir deux solitudes. Barnard a ainsi l'intelligence de conjurer le fatalisme ou la noirceur qui pourraient prendre le dessus par des touches d'humour et de douceur. Si Ali et Ava ont chacun vécu des épreuves qui les marquent encore, pourquoi faudrait-il en rajouter ? Il sera aussi question de musique dans cette histoire. Loin d'être les perdreaux de l'année, ces deux-là deviendront tourtereaux en s'éduquant l'un et l'autre à leurs goûts en la matière. folk et country pour elle, electro-pop et punk pour lui. Barnard imprègne aussi son film de ce multiculturalisme-là, n'ayant pas peur d'enchaîner les scènes confites dans l'eau de rose et d’autres qui mettent les doigts dans la prise d'une énergie juvénile. Et sans que cela soit jamais contradictoire ou prenne des airs de douche écossaise. En creusant des trouées lumineuses dans la grisaille d'un potentiel drame vers un inattendu et irrésistible feel-good-movie, Ali & Ava a tout de l'électrisant coup de foudre de spectateur qui illumine les salles obscures depuis le 2 mars. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
10 Mar 2022 | “Ma Nuit” d’Antoinette Boulat : une immersion dans l’atmosphère de la jeunesse actuelle. | 00:09:08 | |
Ma nuit donne jour à une réalisatrice inattendue. Avant de passer derrière la caméra, Antoinette Boulat à accompagné, en tant que directrice de casting, un certain jeune cinéma français. Des débuts ou presque d'Albert Dupontel à François Ozon en passant par Cédric Kahn, pour ne citer qu'eux. Il était donc logique que pour son premier film, elle s'intéresse à une jeunesse. Celle d'aujourd'hui, qui fait ce qu'elle peut pour traverser une période entre Covid, attentats et réchauffement climatique.
À travers la déambulation de Marion, jeune femme en gestation mais déjà en deuil, Ma nuit poursuit une forme de compagnonnage, cette fois-ci au chevet d'un âge et de ses inquiétudes.
Mais surtout pour tenter autant que possible de l'en libérer, d'apprendre à défaut de pouvoir s'en soulager, vivre avec. En retour d'un splendide film qui tient de l'expérience sensorielle, il était naturel de partager celle d'un travail singulier avec son auteur, pour éclairer sa remarquable Nuit.
En salles le 9 mars Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
18 Mar 2022 | “Medusa” d’Anita Rocha Silvera | 00:10:37 | |
On a souvent oublié que dans la mythologie grecque, si la Méduse s'est transformée en créature hideuse pouvant pétrifier du regard quiconque, c'est parce que les dieux avaient décidé de supprimer sa beauté pour avoir succombé à la tentation charnelle.
Anita Rocha Da Silvera y a vu l'expression d'une colère féminine contre les embrigadements de toute sorte pour la jeune génération de femmes actuelles. Dans le Brésil actuel, même avant l'arrivée au pouvoir de Bolsonaro, cela passe par un retour au conservatisme religieux, virant au fanatisme. Et ce jusqu'au point de transformer des adeptes d'une église évangélique en gang de filles tabassant celles qui ne répondent pas à leur code de bonne moralité. Medusa y répond en osant le sacrilège, d'embardées visuelles invoquant le cinéma fantastique transgressif des années 70 (Argento, Carpenter...) à un mélange des genres, de préférences ceux se foutent des bonnes mœurs. Le tout au nom d'une croisade pour la reconquête de la liberté, celle de penser comme celle d'aimer. Face aux exactions d'une milice religieuse, Medusa tente de réveiller une société tétanisée jusqu'au coma mental. Avec un film sexy et provocant, cachant sous ses apparences pop et son goût pour l'abstraction formelle, un avertissement bien concret à toutes les obédiences qui souhaiteraient maintenir leur contrôle sur les corps et les âmes. Comme dirait l'autre, la peur a changé de camp. Avec Rocha Da Silveira, elle est maintenant du côté du cinéma.
En salles le 16 mars. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
24 Mar 2022 | “Plumes” d’Omar El Zohairy | 00:07:45 | |
“Plumes” part d'un postulat inattendu : après un tour de magie foireux, un ouvrier en usine se retrouve transformé en poulet, mais personne n'arrive à le ramener à une forme humaine. Mais le premier long métrage d'Omar El Zohairy refuse de mettre ses œufs dans un même panier en explorant cette histoire loufoque du point de vue d'une épouse qui se retrouve dépourvue, plongée dans les turpitudes kafkaïennes des labyrinthes administratifs quand elle veut faire reconnaître sa singulière situation.
“Plumes” s'en amuse mais en serrant les dents dans cette comédie aussi absurde qu'amère. Ce jusque dans une surprenante identité de cinéma qui tend les bras à l'humanisme contrarié d'un Kaurismaki ou d'un Dino Risi. Un cinéma intemporel quand rien ne dit où il se situe ni à quelle époque, le seul repère étant qu'on y parle arabe et que le réalisateur est égyptien. Plumes tient donc de la fable et de ses principes de récit universel. Mais alors comment réagit Omar El Zohairy quand, comme lors de sa présentation au festival de Cannes, il est énoncé que ce film-là parlerait avant tout de la société égyptienne ? Sa réponse (et d’autres) au micro de Nova. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
30 Mar 2022 | “Retour à Reims” de Jean-Gabriel Périot : de l’individuel au collectif | 00:10:07 | |
Un essai aussi autobiographique quand il revient sur son parcours de transfuge de classe que collectif quand il explorait aussi la trajectoire du monde ouvrier à travers les générations. Treize ans plus tard, Jean-Gabriel Périot adapte ce livre au cinéma avec Retour à Reims (Fragments). Ou plutôt le complète, prolonge sa lecture sociopolitique pour un état des lieux actualisé mais reposant sur un fantastique montage d'images d'archives, transformant le récit à la première personne d'Eribon en album photo d'une lutte des classes, allant jusqu'au mouvement des Gilets Jaunes. De quoi explorer une autre histoire de France, tout en boucle temporelle, quand ce Retour-là prend la direction d'aujourd'hui. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
31 Mar 2022 | “Le Grand Mouvement” de Kiro Russo : Quand les secousses du capitalisme déclenchent un film tellurique. | 00:07:10 | |
“Le Grand Mouvement” porte incroyablement bien son titre. D'abord dans son récit, celui d'un mineur bolivien débarqué à la Paz, pour retrouver son emploi, mais qui se retrouve atteint d'une mystérieuse maladie qu'il va aller soigner dans la jungle avec un chamane. Ensuite dans sa forme, le film de Kiro Russo, qui alterne sans cesse regard sur l'intime d'un homme et celui sur le grondement collectif d'une métropole, pour une sorte de dantesque symphonie urbaine où la capitale bolivienne prendrait vie comme un personnage à part entière. Le grand mouvement ne se dispersant pas pour autant dans un cinéma expérimental quand il ne perd jamais de vue son idée, limpide, du capitalisme comme virus et maladie gagnant aujourd'hui jusqu'aux corps. Il y propose comme remède une fièvre de l'imaginaire, des spasmes de cinéma dingo en guise d'acte de résistance politique et culturelle : décloisonnant le documentaire et la fiction, voici une impressionnante rêverie chamanique pour espérer sortir du cauchemar social. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
07 Apr 2022 | "Freaks Out" de Gabriele Mainetti : un film de guerre et de superhéros culbutant | 00:03:01 | |
Le cinéma a toujours aimé les monstres, les phénomènes de foire. Peut-être parce qu'à son origine, c'était justement un art forain. Qu'à côté des chapiteaux où l'on exhibait les créatures les plus variées, on projetait les premiers films, avec la même idée d'exacerbation du réalisme. D'ailleurs, si la littérature et la peinture ont longtemps été fascinées par les monstres, le cinéma reste malgré tout l'art qui les a mieux observés. En allant régulièrement chercher chez eux une part d'humanité. Voire inverser la donne en rappelant que c'est chez les gens normaux d'apparence que peuvent se dissimuler les plus bas instincts. De Tod Browning et son bien nommé Freaks à Tim Burton et Edward aux mains d'argent et tant d'autres, beaucoup de cinéastes l'ont martelé. L'italien Gabriele Mainetti se rajoute à la liste avec Freaks out. Une variation sur ce genre qui fait la passerelle avec les films de superhéros en plongeant un quatuor de marginaux dotés de superpouvoirs dans la folie du programme hitlérien. Des Übermensch, cherchant à créer des surhommes au service du IIIe Reich. Pour autant, le royaume de Freaks out est une cour des miracles aussi délirante qu'attachante. Un loup-garou à la force colossale, un aimant humain, une femme électrique et un télépathe contrôlant les insectes, tous crapahutant dans l'Europe chaotique de 1942. Freaks out pourrait n'être qu'une version déviante des X-Men qu'il serait déjà réjouissant. Mais Mainetti y ajoute une généreuse démesure qui le rapproche des univers d'un Paul Verhoeven ou d'un Guillermo Del Toro. Dans cette manière d'exorciser les craintes qu'un cauchemar généralisé recommence par sens de l'excès. Et par le besoin de se rassurer en reconstituant les pires périodes comme une ogresque bouffonnerie. Sans oublier la possibilité de trouver refuge dans un imaginaire sans limites. Et donc forcément, une part d'équilibrisme casse-gueule pour un film qui mêle grand spectacle et Holocauste. Qui ose le trivial haut en couleurs pour aborder la page la plus sombre de l'histoire du XXe siècle. Freaks out regarde cette sale époque sous un angle épique. Mais toujours pour rappeler où se trouvent vraiment les plus atroces anomalies : la véritable monstruosité. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
07 Apr 2022 | “Employé/Patron” de Manuel Nieto Zas, en Uruguay aussi, on s’essaie à franchir les barrières habituelles du cinéma social | 00:02:46 | |
Employé/Patron s'ouvre par une berceuse chantée à un bébé. Mais avec un tel titre, il y a de quoi se douter que ce film uruguayen va sussurrer un autre type de chanson. Surtout, quand une sorte d'inquiétude s'impose dès cette séquence initiale. Il y a du drame dans l'air. Pas celui qui se profilait autour de la santé d'un enfant. Mais autour de la relation entre les familles, d'un patron et d'un employé, qui tournent vinaigre. Surtout quand le second provoque involontairement un accident mortel. Ici pas de salaud ni de victimes, mais le constat d'une étanchéité de classe toujours aussi impossible à transpercer. Même si Rodrigo, le propriétaire terrien, et Carlos, l'ouvrier agricole, ont le même âge et le même profil familial. Ils restent séparés par une hiérarchie sociale. Employé/Patron confirmant qu'en dépit des efforts d'écoute ou de rapprochement, rien n'autorise à sortir d'un lien entre dominant et dominé. Que le passage d'un monde vertical à celui horizontal ne se fera pas sans casse. Zas l'explore par une mise en scène imposant des zones de distance, que ce soit par des blocs de séquences courtes. Mais aussi en érigeant les paysages, et la frontière entre l'Uruguay et le Brésil, comme autant d'obstacles. Qu'ils soient rivières ou forêts qu'il faut sans cesse franchir. Et pourtant, Employé/Patron s'essaie, justement dès son titre, à tenter de réconcilier les camps. À rapprocher ceux qui se ressemblent mais restent séparés par des origines. On voit beaucoup de clôtures dans Employé/Patron. La symbolique d'enclos renvoyant chacun sur son territoire est limpide. Mais Zas a l'intelligence de vouloir en faire autre chose. Avec un scénario et une réalisation qui refusent de se laisser enfermer dans le balisage habituel du cinéma social. Jusqu'à annoncer, avec un final autour d'une course de chevaux, que même si ça ne se fera pas sans mal, il faut tenter de galoper vers un monde qui abolisse les barrières. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
14 Apr 2022 | “Allons Enfants” d’Alban Teurlai et Thierry Demaizières : Vous dansiez ? Eh bien, parlez maintenant. | 00:03:36 | |
La parole et le geste. Il fallait une époque sociale, et politique, aussi trouble que celle d'aujourd'hui en France pour se rendre compte de leur importance. Et c’est sans doute la moindre des choses, que ce soit par l'image que cette prise de conscience se manifeste. Allons enfants, le nouveau documentaire d'Alban Teurlai et Thierry Demaizière, prend la chose à bras le corps. Littéralement. Et suit deux classes de la section « Danse urbaine » du lycée Turgot, à Paris, durant un an. Rien que cet énoncé pose bien l'importance des mots. À Turgot, on dit donc danse urbaine. Dans les coins de banlieues, d'où viennent les élèves suivis par Allons enfants, on dit «Hip Hop ». Toute la différence est déjà là, entre un milieu qui s'affirme comme élite, et celui des classes populaires. Pour autant, c'est bien une passerelle qui est soutenue dans ce documentaire. L'enjeu narratif en sera un concours de battles inter-lycées. Mais plus encore, c’est l'ébauche d'un dialogue entre ces deux mondes qui se joue ici. Elle est arbitrée par ce qui aura, entre autres, manqué pendant la campagne électorale : un programme pour la culture comme moteur d'intégration, d'émancipation et pourquoi pas d'excellence. Ou d'exutoire pour des ados mal partis dans leur histoire, faute de n'avoir pas grandi au bon endroit. Dans Allons enfants, il y a donc les gestes. Plus encore que les figures de coach que deviennent un prof de sport et un proviseur, c'est bien cet angle qui fait office d'expérience pédagogique. Teurlai et Demaizière confortent cette dernière en donnant beaucoup la parole aux enfants. Leur permettant de se livrer sur le véritable choc culturel qu'ils vivent, au gré des mois dans ce lycée. Évidemment, en se propulsant ainsi, le film propose un univers rappelant celui de Fame. Mais si, souvenez-vous du film et de la série des années 80 sur un collège artistique américain. Un récit qui prend des atours parfois trop idylliques lorsqu'il est comparé au champ de bataille qu'est actuellement l'enseignement. Mais rien de grave : Allons enfants revient toujours à une réalité plus souhaitable qu'une directive de Blanquer. Celle d’un système scolaire qui aurait la possibilité, s'il s’en donnait les moyens, de ne plus oublier que tous les enfants sont ceux de la république. Le documentaire s'ouvre sur un prof qui demande aux élèves de se rapprocher pour former un cercle. Plus tard, il les réunira de nouveau pour leur rappeler, mot pour mot, qu'au sein de cet établissement ils sont « chez eux » et peuvent revenir quand ils le veulent. Cette parole, et ce geste-là, valent bien plus que la marseillaise remixée en guise de générique de fin. Quand ils réaffirment pleinement la devise gravée au fronton des écoles pas mal encrassée par une paranoïa identitaire : “ liberté, égalité, fraternité ”. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
20 Apr 2022 | “Et j'aime à la fureur” d’André Bonzel : Le cinéma c’est aussi une manière de transformer des prises de vues en prises de vie | 00:03:54 | |
Le cinéma c'est forcément une histoire de projection. De manière naturelle, organique et ontologique évidemment, puisque c'est un art qui est né de ça. Sans projecteur, pas de cinéma. Mais pas seulement. Pour la plupart des cinéphiles purs et durs, cela tient de la projection de soi, voire d'une vie par procuration. André Bonzel est sans doute de ceux-là. Pour preuve, sa collection quasi-fétichiste de films amateurs qu'il engrange depuis des décennies. À travers eux, c'est d'innombrables heures de fragments du quotidien et de moments de vie qui se sont égrenés. Celles d'anonymes, dont Bonzel ne sait sans doute rien d'autre que ces images récupérées ici et là. Mais elles ont en commun d'inscrire dans des mémoires familiales, des instants de bonheur et de joies ordinaires. Mais aussi d'en être une trace, fragile car filmée sur des pellicules, souvent périssables. Mais qui n'en reste pas moins une forme de souvenir en mouvement, des fragments d'une histoire anonyme. (Headlines) André Bonzel, lui, n'est pas un cinéaste anonyme, puisqu'il faisait partie du trio cosignataire du fameux C'est arrivé près de chez vous. Pour le coup ce titre-là aurait pas mal collé à Et j'aime à la fureur, première réalisation en solo pour Bonzel. Surtout au vu de la proximité immédiate qui émane de ces images de Mr et Mme tout le monde. Bonzel s'en est emparé pour un étonnant film-essai. Qui est à la fois détournement de ces images étrangères, et récit de son propre roman personnel. Qu'est-ce qui tient du vrai ou du faux dans ce que déroulent ces séquences suturées les unes aux autres ? On n'en saura rien. La seule certitude qui s'installe au long d'Et j'aime à la fureur, est une relation complexe, faite d'adoration et de détestation envers sa famille. Mais aussi cette envie de solder les comptes, pour arriver à faire la paix avec soi-même. Essayer de dénouer les nœuds d'une mémoire mentale, où souvenirs et imaginaire ont fini par se confondre. Si ce titre fait écho à un poème de Baudelaire (« Et j'aime à la fureur/ les choses où le son se mêle à la lumière »), la démarche de Bonzel est plus clairement proustienne. Quand elle fait le bilan du temps qui passe et s'aventure dans la réécriture d'une vie, entre probables bouts de vrai et fantasmes guérisseurs de traumatismes enfantins. Bonzel superposant à ces images, une voix-off, la sienne, énonçant un journal intime, souvent picaresque et parfois cru. En transformant des prises de vues en prises de vie, naviguant d'un jeu de montage à un « je » en surmoi démonté Et j'aime à la fureur installe une capacité à résonner chez chacun. Et cela par une sorte de reflet collectif, rappelant à quiconque que nous sommes des maillons d'une éternelle chaîne humaine. Ayant en commun d'avoir tous traversé certaines phases, de la vénération de ses parents à l'affirmation de soi. Et plus encore de ressusciter une part collective de fantômes d'enfances. Qui se sont autant effilochées, désagrégées que la pellicule de certaines séquences de ces archives où l'on ne distingue même plus le visage des personnes filmées. Et j'aime à la fureur est un vrai film en trompe-l'œil. Son ton unique, accrochant exutoire libérateur, et regrets nostalgiques aux branches d'un délirant arbre généalogique, déclenche beaucoup de larmes et de fous rires. Pour une immense émotion, qui, elle, n'a absolument rien de factice. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
28 Apr 2022 | "Ghost Song" de Nicolas Peduzzi : Houston, on a toujours un gros problème | 00:02:58 | |
Évidemment celui de la présidence Trump depuis son élection en novembre de l'année précédente. Mais aussi, ceux plus naturels, qui traversèrent les États-Unis. Notamment Harvey, l'un des plus puissants depuis Katrina qui avait balayé la Nouvelle-Orléans. Nicolas Peduzzi a posé les caméras de Ghost Song à Houston, Texas, alors qu'Harvey se rapproche. Dans ce climat pré-apocalyptique, il filme d'autres tempêtes, plus intimes mais pas moins ravageuses. Celles qui touchent trois vies, ou plutôt trois survies. Will, Nate et Alexandra viennent de milieux sociaux différents, mais se retrouvent dans une même errance dans le quartier de Third Ward. Situé au centre de la ville, il devient un autre œil du cyclone dans Ghost Song. Peduzzi y suit ce panel pour raconter une génération de trentenaires déboussolés, mais pas apathiques. Le vent qui souffle dans ce documentaire est justement celui d'une rogne collective. À ce tempo, Peduzzi ajoute les sonorités électro et rap de l'époque, dans une bande son incarnant un personnage à part entière. Pour autant, comme son titre l'indique, il y a bien des fantômes dans Ghost Song. En partie ces trois protagonistes, qui tournent en boucle dans leur malaise. Mais plus encore, les racines d'une Amérique qui remonte au blues. Piste confirmée par cette séquence où Will, prenant sa guitare, improvise un couplet sur son quotidien. Avant que son oncle enchaîne sur le sien. Et c’est un surprenant remix de cinéma que joue Peduzzi. Quand son documentaire se fait parfois plus incroyable qu'une fiction. Et cela sans même avoir besoin de revenir sur des coïncidences folles, comme le lien de parenté entre Alexandra et George Floyd. Où quand Will, Alexandra et Nate, dans des scènes visiblement rejouées, ont plus d'intensité et de charisme naturel que bon nombre d'acteurs chevronnés. Un autre spectre peut alors s'inviter, celui du travail d'Harmony Korine. Peduzzi filme, avec la même compassion, une Amérique dans sa densité comme dans sa démesure et sans s'encombrer d'une échelle de classe sociale. Dans Ghost Song, tout le monde est réuni au diapason d'une même absurdité. Par exemple, quand pour pouvoir se payer les médicaments opioïdes nécessaires tous les jours pour calmer ses douleurs, il faut devenir à son tour dealer. Peduzzi se refuse cependant à vouloir acter un requiem pour cette vie de quartier. Au contraire, Ghost Song s'incarne dans ce à quoi les gens qu'ils filment peuvent encore s'accrocher. Une fureur. De vivre forcément. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
05 May 2022 | “Ego” d’Hannah Bergholm : petit à petit, le cinéma fantastique nordique s’affirme comme un drôle d'oiseau | 00:02:57 | |
Il y a quelques mois, l'Islande envoyait une surprenante carte postale avec Lamb, et son enfant-agneau. Et voilà qu'un autre drôle d'animal débarque de Finlande dans Ego. Un oiseau gigantesque, qui prend peu à peu les traits de Tijna, une adolescente mal dans sa peau. Tout part de la découverte d'un curieux œuf, que cette gamine va couver. Mais Ego tient surtout d'un jeu tordu de poupées russes, puisque sous la coque de cette histoire de dopplegänger, ces doubles maléfiques, se dissimule surtout une cellule familiale qui se fissure progressivement. Notamment autour d'une mère qui veut modeler sa progéniture à son image, physique comme sociale. Mais visiblement, Ego ne veut ressembler à rien ni personne d'autre... Effectivement, en croisant le terrain d'un David Cronenberg et son obsession sur les mutations corporelles. Avec la possible obsolescence des sentiments qu'elles engendreraient, et un univers de teen movie rose bonbon peu à peu entaché par du rouge sang. La réalisatrice Hannah Bergholm fait sortir de cette inattendue coquille, un discours audacieux autour de la féminité. À se demander ce qui est le plus tranchant dans Ego. La manière dont Tijna rompt le cordon avec sa mère ? Ou le portrait d'une femme qui considère son enfant comme un accessoire à la mode ? Bergholm rajoutant à ce malaise, un humour nordique et particulièrement froid. Que ce soit dans l'environnement aussi kitsch que glacé de cette famille, ou cette combinaison d'empathie et de délires freudiens. Ego couche donc sur le canapé une collection de névroses modernes. De l'atavisme générationnel à la double dictature de l'apparence et de la perfection. Bergholm attaquant le tout à coups de becs acérés, pour lui voler dans les plumes. Mais aussi confirmer les éclosions inattendues et l’envol d'un cinéma fantastique d'Europe du Nord. Actuellement plus surprenant que ses voisins géographiques. Seul bémol, l'absence de passage en salle pour ce film singulier, qui n'aura trouvé en France qu'une sortie en Blu-Ray pour faire son nid. Mais puisque c'est le seul moyen de le voir ici, alors, comme on disait dans les cours de latin : ego te absolvo. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. | |||
12 May 2022 | “The Northman” : Le monde du cinéma de studio hollywoodien serait-il plus âpre que la mythologie viking ? | 00:04:19 | |
Il sera intéressant un jour de se pencher sur la sorte de malédiction qui pèse sur les films de vikings faits par des réalisateurs américains. Régulièrement, on a vu des cas de projets super excitants autour d'épopées revenant sur ces guerriers nordiques. Donnant à l'arrivée non pas des films ratés, loin de là, mais claudicants, jamais vraiment à la hauteur de leurs auteurs. Ainsi, il faut se souvenir du 13e guerrier de John McTiernan, qui aurait pu être à ce registre ce que son Piège de cristal avait été au blockbuster d'action. Si le romancier Michael Crichton n'avait pas remonté le film dans le dos du cinéaste. Il y avait aussi le projet extravagant nourri par Mel Gibson, celui d'une saga nordique qui aurait été parlée en véritable langue viking. Avant de l'abandonner faute de financement, malgré la présence prévue de Leonardo DiCaprio au casting. Aujourd'hui, c'est au tour de Robert Eggers de s'attaquer à cette mythologie avec The Northman. Après deux premiers films décapants, The witch et The Lighthouse, revisites dérangées du monde de la sorcellerie ou de la folie selon Lovecraft, Eggers est allé dégotter non seulement la légende nordique qui allait plus tard inspirer Hamlet à Shakespeare mais s'est entiché d'un savoir encyclopédique sur les tribus vikings. The Northman promettait de rallier à la fois un divertissement épique à la Conan le Barbare, mais aussi d'être traversé de visions folles, entre chevauchée de valkyries et rituels de possessions chamaniques. Tout ça est encore un peu là à l'arrivée. Mais la trajectoire s'est heurtée à la transition entre un cinéma indépendant et une production de studio hollywoodienne. La seconde ayant visiblement imposé ses impératifs de rentabilité, sur une fresque qui aurait dû être plus baroque, plus intransigeante. Mais alors pourquoi faudrait-il aller voir The Northman ? Simplement parce qu'en dépit ses luttes économico-intestines, visiblement plus dantesques que le film en soi, The Northman a conservé de fantastiques éclats. Même s'ils ne sont que sporadiques. Mais aussi, parce que la croisade furibarde d'un prince déchu pour venger son père, est doublée de celle pour une foi en un cinéma à grand spectacle, porté disparu. Il y a quelque chose ici d'organique, voire d'incarné, qui place The Northman bien au-dessus du cinéma d'aventure américain actuel, déshydraté par les effets spéciaux. The Northman a quelque chose qui lui redonne chair (et sang). Même si cette quête du Valhalla est freinée par la vision précautionneuse d'un studio, elle a des airs de baroud d'honneur, démesuré et lyrique. On peut appeler ça un beau geste. Mais aussi y voir un dernier bout de paradis perdu qui lui aussi, risque de n'être bientôt plus qu'une glorieuse mythologie de cinéma si ce type de projet hors normes n'est pas un minimum soutenu. Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations. |